Day Crations rflexives 2014 La grande aventure cest

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Day Créations réflexives 2014

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 «La grande aventure, c’est de voir surgir quelque chose d’inconnu, chaque jour, dans

«La grande aventure, c’est de voir surgir quelque chose d’inconnu, chaque jour, dans le même visage. C’est plus grand que tous les voyages autour du monde. » Alberto Giacometti Cette série de diaporamas, que j’ai intitulée «Visages» , ne se veut pas une expérience biographique. Les limites imposées par un diaporama ne permettent pas, d’ailleurs, de présenter des biographies au sens traditionnel. «Visages» montre tantôt des figures publiques bien connues, tantôt des personnalités plus effacées et plus obscures. Mais derrière chacun de ces visages, il peut arriver qu’il se cache quelqu’un d’étonnant. Si «Visages» a bien sûr pour objectif d’informer, il a donc surtout pour but de surprendre. Car, comme l’écrit Yvon Deneault, «L’être humain a deux visages: celui qu’il nous montre et celui qu’il a vraiment. » Ce quatorzième diaporama de la série pourrait susciter la réflexion suivante : l’accomplissement de grandes œuvres requiert souvent davantage de courage que d’instruction. R. Day

Visages Rosalie Cadron-Jetté

Visages Rosalie Cadron-Jetté

Premier enfant d’Antoine Cadron dit St Pierre, cultivateur, et de Rosalie Roy dit Desjardins,

Premier enfant d’Antoine Cadron dit St Pierre, cultivateur, et de Rosalie Roy dit Desjardins, sage femme, Rosalie Cadron est née dans le petit bourg québécois de Lavaltrie (situé non loin de Joliette) le 27 janvier 1794. Cela fait seulement une trentaine d’années que la Nouvelle France est devenue possession britannique. On y trouve peu d’écoles et les moyens d’accéder à l’instruction sont très limités, sauf pour l’élite anglo protestante. Comme bien des jeunes filles de son époque, Rosalie ne sait ni lire ni écrire. Mais auprès de ses parents, elle apprend à tenir maison, à faire de la couture et de l’artisanat.

La maison où Rosalie a vu le jour et dans laquelle a vécu jusqu’en

La maison où Rosalie a vu le jour et dans laquelle a vécu jusqu’en 1822 existe toujours. Construite vers 1790, c’est aujourd’hui un musée où on peut voir notamment la cuisine de Rosalie ainsi que des meubles et objets de cette époque. La maison de Rosalie Cadron Jetté, photographiée en 1925

La maison où Rosalie a vu le jour et dans laquelle a vécu jusqu’en

La maison où Rosalie a vu le jour et dans laquelle a vécu jusqu’en 1822 existe toujours. Construite vers 1790, c’est aujourd’hui un musée où on peut voir notamment la cuisine de Rosalie ainsi que des meubles et objets de cette époque.

La maison où Rosalie a vu le jour et dans laquelle a vécu jusqu’en

La maison où Rosalie a vu le jour et dans laquelle a vécu jusqu’en 1822 existe toujours. Construite vers 1790, c’est aujourd’hui un musée où on peut voir notamment la cuisine de Rosalie ainsi que des meubles et objets de cette époque.

Le 7 octobre 1811, Rosalie épouse Jean Marie Jetté, le frère d’un oncle par

Le 7 octobre 1811, Rosalie épouse Jean Marie Jetté, le frère d’un oncle par alliance. On pense qu’ils s’étaient rencontrés à l’occasion d’une fête de famille. Rosalie n’a que 17 ans tandis que son époux est âgé de 33 ans. Mais un tel écart d’âge n’était pas exceptionnel en ce temps là; il y avait par exemple 15 ans de différence entre les parents de Rosalie. Les nouveaux mariés s’installent dans cette petite maison de Lavaltrie avec les parents de Rosalie qui leur cèdent rapidement leur propriété à condition que le jeune couple prenne soin d’eux jusqu’à leur mort – un arrangement fréquent à l’époque.

De cette union naîtront entre 1812 1832 onze enfants, dont cinq meurent en bas

De cette union naîtront entre 1812 1832 onze enfants, dont cinq meurent en bas âge. La région qu’ils habitent ne possédant pas suffisamment de terre pour y établir leur progéniture, Jean Marie et Rosalie vendent leur propriété en 1822 avec l’espoir de tenter leur chance ailleurs. Ils habitent un temps à Verchères puis s’installent à Saint Hyacinthe où ils acquièrent une ferme en 1824. Or il appert que le vendeur n’en était pas propriétaire. Un second contrat de vente tout aussi nébuleux que le premier est donc conclu deux ans plus tard, mais il s’avère que Jean Marie Jetté est incapable de payer une deuxième fois le bien acquis. Les Jetté sont ruinés et ils décident alors de venir s’établir à Montréal où, en 1827, un document légal précise que la famille habite au faubourg Saint Laurent (l’actuel Quartier Latin de Montréal) et que Jean Marie travaille comme journalier. Rosalie aurait aussi occupé un emploi rémunéré afin d’aider son mari à subvenir aux besoins de la famille, mais on ignore lequel.

Montréal, vers 1830

Montréal, vers 1830

Montréal, vers 1830

Montréal, vers 1830

Montréal, vers 1830

Montréal, vers 1830

En 1828, les deux fils aînés (Jean Marie, 16 ans, et Pierre, 13 ans)

En 1828, les deux fils aînés (Jean Marie, 16 ans, et Pierre, 13 ans) deviennent apprentis chez des maîtres cordonniers dont ils apprennent le métier. Leur départ du foyer soulage financièrement les parents, en plus de libérer un peu d’espace pour le reste de la maisonnée. Mais il faut préciser qu’en même temps que les plus vieux partent, d’autres arrivent : Rosalie accouche de son dixième enfant en février 1830 (la petite fille ne vivra qu’une année) et de son onzième et dernier en 1832 (la petite meurt en 1836).

À cette époque, la population de Montréal atteint les 20 000 habitants. S’y côtoient

À cette époque, la population de Montréal atteint les 20 000 habitants. S’y côtoient une majorité de Canadiens français auxquels s’ajoutent des Irlandais, des Écossais et d’autres immigrants venus d’ailleurs dans le monde. Les zones résidentielles sont de plus en plus denses. De petites maisons collées les unes aux autres abritent souvent des familles nombreuses. La promiscuité est un réel problème. Comme les services publics sont très limités, les ordures s’empilent dans les rues. Les résidants et les industries jettent dans les voies d’eau de la ville les déchets qui s’accumulent , ce qui contribue dangereusement à la propagation de maladies.

À l’été 1832, une épidémie de choléra asiatique s’abat sur l’Est du Canada. Après

À l’été 1832, une épidémie de choléra asiatique s’abat sur l’Est du Canada. Après la ville de Québec, la contagion gagne Montréal. Les rivières polluées par les ordures deviennent le conduit principal de ce fléau sans pitié. Un article de 1832 décrit ainsi la situation : «Dans toutes les rues, on pouvait voir des femmes au visage marqué par la terreur en train de pleurer… des charrettes transportant des cercueils, occupés chacun par quatre ou cinq personnes, passaient fréquemment… le commerce semblait paralysé… et bon nombre de nos concitoyens quittaient la ville, une belle panique d’une nature presque indescriptible semblait s’être emparée de tous les habitants. » À Montréal seulement, près de 2 000 habitants succombent. Parmi eux, Jean Marie Jetté, l’époux de Rosalie, qui rend l’âme vingt quatre heures seulement après avoir contracté la maladie, le 14 juin 1832.

À 38 ans seulement et après 21 ans de mariage, Rosalie se retrouve donc

À 38 ans seulement et après 21 ans de mariage, Rosalie se retrouve donc seule avec sept enfants, dont un bébé d’un mois et trois autres enfants dont les âges varient de 11 à 17 ans (les deux plus vieux, comme nous avons vu, ont déjà quitté le foyer et travaillent comme cordonniers, tandis qu’une fille âgée de 19 ans est sur le point de se marier). De plus, elle prend soin de sa mère âgée et invalide. «Elle reprend le cours de sa vie, écrit sa biographe Hélène Grégoire, partageant son temps entre l’entretien de son logis, les visites à l’église, l’aide aux plus démunis et, naturellement, les soins aux membres de sa famille. » Rosalie vit alors tout près de l’église Saint Jacques qu’elle fréquente assidument chaque jour : le matin, elle y entend trois messes consécutives; elle y retourne l’après midi pendant plusieurs heures pour prier. C’est par la fréquentation de cette église qu’elle se lie avec son chapelain, l’abbé Ignace Bourget. L’abbé Ignace Bourget

En 1840, Ignace Bourget devient le second évêque du diocèse de Montréal. Il est

En 1840, Ignace Bourget devient le second évêque du diocèse de Montréal. Il est bien au courant des épreuves qu’a traversées Rosalie Cadron Jetté au cours de sa vie et de la façon dont elle les a surmontées. Sa piété l’a impressionné. Il l’a vue donner de la nourriture et des vêtements aux miséreux, recueillir des orphelins afin de leur trouver une famille d’accueil, intervenir auprès des gens d’affaires afin qu’ils procurent du travail aux pères de famille. Pour sa part, l’évêque jongle avec un projet controversé et qui ne manque pas d’audace pour l’époque : recueillir et venir en aide aux filles mères. Mgr Bourget est préoccupé par l’expansion démographique connaît alors Montréal : les habitants des campagnes délaissent leur terre pour s’installer en ville en même temps que les immigrants affluent en grand nombre. Montréal compte alors 50 000 habitants et les «désordres de la vie urbaine» ne cessent de croître. Parmi ceux ci figure le scandale le plus maudit de l’époque : la maternité hors mariage et ce qui en découle – les infanticides et les abandons de nouveau nés.

Voici ce qu’écrit l’abbé Antoine Rey : «Un jour, en 1840, une pauvre fille

Voici ce qu’écrit l’abbé Antoine Rey : «Un jour, en 1840, une pauvre fille enceinte d’un commerce illégitime vint, comme font beaucoup d’autres, faire à son Évêque l’humble aveu de sa faute et intéresser sa charité relativement à son état actuel […] Monseigneur l’Évêque fit appeler la Veuve Jetté, et la pria de placer cette fille chez une femme charitable et pieuse jusqu’à ce qu’elle fut rétablie. Après cette époque, le même cas se présenta bien souvent, et le même moyen fut mis en œuvre, de sorte que pendant quatre ans la Veuve Jetté servit comme d’agent à Mgr Bourget pour cher un asile secret à chacune de celles qui en désiraient et pour porter l’enfant quand il venait au monde, aux sacrés fonts et de là chez les Sœurs Grises. » Entre 1840 1845, plus de 25 jeunes filles sont ainsi confiées à Rosalie. Au moment de l’accouchement, elle les soigne et aide à leurs «relevailles» . Elle va faire baptiser les nouveau nés à l’église Notre Dame puis les porte à la crèche des Sœurs Grises. Mgr Bourget juge que Rosalie Cadron Jetté est la personne toute désignée pour actualiser le projet auquel il songe depuis un certain temps : fonder une nouvelle communauté religieuse «sans tradition ni attaches antérieures gênantes» , destinée à venir en aide aux mères célibataires – des femmes qui à l’époque étaient reniées par leur famille, sans ressource, acculées à une vie de misère ou de prostitution, sans presqu’aucune chance de pouvoir refaire leur vie.

La requête de l’évêque de Montréal surprend Rosalie qui demande à réfléchir quelques jours.

La requête de l’évêque de Montréal surprend Rosalie qui demande à réfléchir quelques jours. Elle acquiesce finalement à la demande de Mgr Bourget. Le 1 er mai 1845, elle s’installe dans le grenier de la maison de son fils Pierre, avec une jeune fille qui vient d’accoucher. Ce lieu qui évidemment doit demeurer très discret compte tenu des mentalités prend le nom d’Hospice de Sainte Pélagie. Informés de la mission de leur mère, les enfants de Rosalie sont sous le choc; certains sont récalcitrants. Mais à la suite d’une intervention de l’évêque, ils décident de ne pas s’opposer au projet de leur mère et même de la soutenir. Dès lors, l’Hospice de Sainte Pélagie accueille de plus en plus de jeunes femmes en difficulté. Elles sont parfois jusqu’à huit dans ce grenier exigu auquel on ne peut accéder que par un escalier extérieur. La Maternité fonctionne dans des conditions d’extrême dénuement : une table, des chaises, quelques lits, un poêle et les ustensiles indispensables. À l’été 1845, une dame se joint à Rosalie : Sophie Desmarets, veuve de Michel Raymond. C’est elle qui ira solliciter l’aide d’Olivier Berthelet, un homme politique et grand philanthrope montréalais. Celui ci deviendra, avec sa sœur, le plus important bienfaiteur de l’Hospice, lui procurant argent, nourriture, meubles et bois de chauffage.

 «À la pauvreté matérielle, le lot de tous les jours en ces débuts

«À la pauvreté matérielle, le lot de tous les jours en ces débuts difficiles, s’ajoute la désapprobation publique qui, malgré la discrétion entourant la fondation de l’Hospice de Ste-Pélagie, monte au fur et à mesure que les honnêtes gens sont informés de ce qui se vit derrière les portes closes du grenier de la rue Saint-Simon. Sans doute aussi que les allées et venues de Rosalie et de sa compagne, Mme Raymond, vers les fonts baptismaux de l’église Notre -Dame puis la Crèche d’Youville, ont vite fait de révéler le secret qu’on aurait voulu préserver. Les injures pleuvent sur Rosalie et sur son œuvre. Certaines personnes lui prédisent, avec condescendance, que sa fondation est vouée à l’échec; que sa maison sera vandalisée; que les filles qu’elle héberge sont méchantes et pourraient l’attaquer. On lui reproche de “favoriser le vice”, de “soutenir des créatures avilies et dégradées”. Des proches l’accusent même d’être la honte de la famille. Ces assauts de mépris ne l’ébranlent pas. Elle répond par son silence aux injures qu’on lui fait. » (Hélène Grégoire)

Un an après la fondation de l’Hospice de Sainte Pélagie, 33 jeunes femmes y

Un an après la fondation de l’Hospice de Sainte Pélagie, 33 jeunes femmes y avaient trouvé refuge et y avaient reçu les soins exigés par leur condition. De toute évidence, le grenier de la rue Saint Simon était trop petit. Le 4 mai 1846, Rosalie et Mme Raymond s’installent dans une maison en bois de deux étages, située sur la rue Wolfe. Trois nouvelles dames dont l’une d’elles – Mme Montrait – est sage femme se joignent à l’œuvre de Rosalie. Ici s’achève la dernière période de la vie civile de Rosalie Cadron Jetté. L’Hospice de Sainte Pélagie, situé sur la rue Wolfe

Le 26 juillet 1846, les «Dames de Sainte Pélagie» entrent en noviciat (une étape

Le 26 juillet 1846, les «Dames de Sainte Pélagie» entrent en noviciat (une étape préliminaire à la vie religieuse). Mme Raymond est nommée supérieure temporaire tandis que Rosalie se voit confier l’accueil des jeunes filles enceintes et des futures religieuses ou aspirantes dont sept nouvelles ont fait leur entrée au noviciat. Mgr Bourget se désigne comme responsable canonique et spirituel du noviciat. À l’élection du 6 novembre 1846, Rosalie est nommée supérieure pour une année et une dame Josephte Malo Galipeau, entrée au noviciat en septembre (dont nous reparlerons plus tard), est nommée son assistante. Mais voilà qu’au printemps 1847 le propriétaire de la maison qui abritait l’Hospice de Sainte Pélagie, soucieux de sa réputation, en expulse les occupantes. Et aucun autre propriétaire ne veut voir son nom associé à l’Hospice. Finalement, après de multiples démarches, en avril 1847 un homme d’affaires consent à loger l’Hospice dans un édifice situé sur la rue Sainte Catherine.

Le 16 janvier 1848, à l’âge de 53 ans, Rosalie Cadron Jetté et sept

Le 16 janvier 1848, à l’âge de 53 ans, Rosalie Cadron Jetté et sept consœurs de travail prononcent leurs vœux de religion devant Mgr Ignace Bourget, évêque de Montréal, et sœur Émilie Gamelin, fondatrice des Sœurs de la Providence. Rosalie prend le nom de sœur de la Nativité. Dans son Mandement, l’évêque précise qu’elles porteront désormais le nom de Sœurs de Miséricorde. L’Institut des Sœurs de Miséricorde reçoit pour mission de «vivre la miséricorde de Jésus Sauveur avec les filles et les femmes en situation de maternité hors mariage et leurs enfants, et, encore, avec les mères de famille vivant difficilement leur maternité. » C’est la première communauté religieuse au Canada à recevoir un tel mandat. En plus des trois vœux traditionnels de pauvreté, chasteté et obéissance, les Sœurs de Miséricorde prononcent aussi un quatrième vœu : «assister les femmes pauvres dans leurs maladies» . Ce dernier vœu les amènera à suivre une formation de sage femme dispensée par le Collège des médecins et chirurgiens du Bas Canada et à recevoir un certificat de sage femme.

Malgré leur discrétion, les Sœurs de Miséricorde et leur mission n’échappent pas à la

Malgré leur discrétion, les Sœurs de Miséricorde et leur mission n’échappent pas à la désapprobation publique. L’endroit où elles œuvrent doit demeurer secret afin de protéger les mères célibataires des injures et du mépris. Les religieuses elles mêmes et les novices se font injurier presque quotidiennement lorsqu’elles emmènent les nouveau nés à l’église Notre Dame pour les faire baptiser puis chez les Sœurs Grises à qui ils sont confiés. De fait, la communauté déménagera plusieurs fois au cours des années.

Le quotidien chez les Sœurs de Miséricorde

Le quotidien chez les Sœurs de Miséricorde

Le 17 janvier 1848 a lieu l’élection des premières officières de la communauté. C’est

Le 17 janvier 1848 a lieu l’élection des premières officières de la communauté. C’est Josephte Malo Galipeau (en religion sœur Sainte Jeanne de Chantal) qui est élue supérieure. La fondatrice Rosalie Cadron Jetté (en religion sœur de la Nativité) est nommée conseillère tout en conservant ses fonctions d’infirmière. Le fait que la fondatrice de cette communauté religieuse ne soit pas nommée supérieure a de quoi surprendre. Comme Josephte Malo Galipeau avait apporté avec elle plusieurs biens en joignant la communauté, on aurait jugé qu’elle était douée pour l’administration. En outre, elle possédait un peu d’instruction et elle avait, semble t il, une prédisposition au commandement. Longtemps après la mort de Rosalie Cadron Jetté, on a appris que la fondatrice s’était fait offrir le poste de supérieure mais qu’elle avait refusé cette charge. Elle préférait, a t on dit, poursuivre son travail auprès de la clientèle de la maternité, aller soigner les malades à domicile et visiter les prisons. Sœur Sainte Jeanne de Chantal va donc diriger la communauté pendant quinze ans et, sous son supériorat, elle ne manquera aucune occasion de se comporter avec méchanceté envers la fondatrice des Sœurs de Miséricorde.

Josephte Malo Galipeau ~ Sœur Sainte Jeanne de Chantal Le comportement disgracieux de la

Josephte Malo Galipeau ~ Sœur Sainte Jeanne de Chantal Le comportement disgracieux de la première supérieure des Sœurs de Miséricorde envers la fondatrice de la communauté nous oblige ici à relater sa conduite. Fille de Louis Ayet dit Malo et de Marie Josette Fontaine, Josephte Malo est née à Belœil et a étudié au couvent de l’endroit. En 1818, elle épouse Alexis Galipeau. Ce dernier rejoint les Patriotes lors de la bataille de Saint Charles, le 25 novembre 1837. Selon la tradition orale, elle passa cette journée entière sans manger et les bras en croix. Devenue veuve en 1846, à l’âge de 47 ans, elle entre la même année au noviciat des Sœurs de Miséricorde et prend le nom de sœur Sainte Jeanne de Chantal. Elle avait hérité de son mari quelques biens qu’elle apporta avec elle dans la communauté.

Les recherches menées par les historiens ayant relaté l’histoire des débuts des Sœurs de

Les recherches menées par les historiens ayant relaté l’histoire des débuts des Sœurs de Miséricorde nous apprennent les faits suivants : ● Non seulement la supérieure ne donne jamais le titre de «fondatrice» à sœur de la Nativité devant les autres religieuses, mais lorsque des ouvrages mentionnent à tort que la communauté a été fondée par sœur Sainte Jeanne de Chantal, celle ci s’abstient de rectifier cette information erronée. Ainsi, plusieurs nouvelles religieuses qui rejoindront la communauté ultérieurement ignorent que Mère de la Nativité est leur fondatrice. Plus tard, des sœurs ont témoigné : «On ne semblait pas aimer à reconnaître Mère de la Nativité comme fondatrice. Aussi, c’était une question qu’il valait mieux ne pas aborder, car la supérieure, passant pour fondatrice, n’aimait pas cela. On craignait même d’en parler. » ● Dans les réunions, la supérieure impose le silence à la fondatrice et va jusqu’à la traiter de folle. ● La punition de prédilection que la supérieure aime infliger à la fondatrice est de la priver de communion. ● À partir de 1859, la santé de Mère de la Nativité décline beaucoup. Elle souffre d’un œdème généralisé vraisemblablement causé par une diminution progressive et fatale de la fonction rénale. Elle a de graves difficultés à respirer et à se déplacer. La supérieure l’installe alors dans une chambre éloignée de la chapelle et des activités de la maison et interdit aux sœurs et aux novices d’aller la visiter. Elle lui interdit aussi de recevoir ses enfants. Elle l’oblige même, en dépit de ses difficultés à marcher, à descendre trois escaliers pour venir à la récréation et au réfectoire. Lorsqu’elle ne peut plus du tout se déplacer, la supérieure lui fait porter de la nourriture insuffisante et même avariée. Elle trouve prétexte pour que les médicaments qui lui ont été prescrits ne lui soient pas donnés. Elle la laisse dormir sur une paillasse infectée de punaises. À un moment, elle suggère de placer la fondatrice chez les Sœurs Grises, parmi les femmes nécessiteuses, âgées et mourantes : «Cette pauvre vieille, je ne lui souhaite pas la mort, mais si elle mourait, elle nous débarrasserait bien» , l’entendent dire des sœurs.

● L’histoire des premières années des Sœurs de Miséricorde, dans les mots mêmes de

● L’histoire des premières années des Sœurs de Miséricorde, dans les mots mêmes de la fondatrice, est perdue. Voici ce que relate sa biographe : «Mgr Bourget avait demandé aux sœurs ayant fait profession en 1848 de recueillir des notes et des écrits sur l’origine de la communauté. Rosalie a donc, en sa possession, quelques pages sur les commencements de son œuvre qu’elle aurait probablement dictées à une compagne – rappelons qu’elle ne savait pas écrire. Sœur Sainte. Jeanne-de-Chantal ordonne un jour à Rosalie de lui remettre ces papiers, ce à quoi Rosalie répond qu’elle les tient par ordre de Mgr Bourget. La supérieure insiste et Rosalie, obéissante, lui remet ce bien précieux, qui sera rapidement jeté au feu. » Jamais, durant toutes ces années, Mère de la Nativité ne s’est plainte du traitement que lui infligeait la supérieure. Mais le règne de sœur Sainte Jeanne de Chantal prit finalement fin après plus de 15 ans de despotisme sur la communauté et sa fondatrice. Informé de la situation, Mgr Bourget se rendit au monastère et demanda aux religieuses d’élire un nouveau conseil; il précisa que les élues ne pourraient plus dorénavant demeurer en fonction aussi longtemps.

Le musée des Sœurs de Miséricorde conserve précieusement cette chaise dans laquelle se reposait

Le musée des Sœurs de Miséricorde conserve précieusement cette chaise dans laquelle se reposait la fondatrice dans les derniers mois précédant son décès.

Le 4 avril 1864, Mgr Ignace Bourget se rend au chevet de Mère de

Le 4 avril 1864, Mgr Ignace Bourget se rend au chevet de Mère de la Nativité, agonisante. Elle décède dans la nuit du 5 avril 1864, âgée de 70 ans. À sa mort, Rosalie Cadron Jetté était la mère de six enfants toujours vivants et la grand mère de 41 petits enfants. Mère de la Nativité laissait une communauté comptant 47 membres, dont 33 professes, cinq novices, six postulantes et trois sœurs Madeleine ayant prononcé des vœux et plusieurs autres femmes impliquées dans l’Institut. Le 8 avril 1864, ses funérailles furent célébrées par Mgr Bourget dans la chapelle des Sœurs de Miséricorde, en présence de plusieurs dignitaires de l’Église de Montréal. L’évêque lui rendit hommage pour les sacrifices qu’elle avait vécus, sa vie simple et cachée, son audace et son courage exceptionnel.

En 1889, vingt cinq ans après la mort de Rosalie Cadron Jetté, les Sœurs

En 1889, vingt cinq ans après la mort de Rosalie Cadron Jetté, les Sœurs Grises demandent aux Sœurs de Miséricorde de pourvoir désormais à l’hébergement des enfants nés à leur maternité en raison de la surcharge de leur crèche. C’est alors que les Sœurs de Miséricorde organisent leur première crèche.

Le visage de Rosalie Cadron Jetté (Mère de la Nativité) nous serait tout à

Le visage de Rosalie Cadron Jetté (Mère de la Nativité) nous serait tout à fait inconnu sans cette seule et unique photo d’elle, prise peu de temps avant sa mort. Toutes les autres représentations de son visage s’inspirent de cette photo.

Lorsqu’il prit sa retraite comme évêque de Montréal, en 1876, Mgr Ignace Bourget se

Lorsqu’il prit sa retraite comme évêque de Montréal, en 1876, Mgr Ignace Bourget se retira à Sault au Récollet, à la Maison Saint Janvier; il y vécut les dernières années de sa vie. C’était une résidence qu’avait fait bâtir en 1853 le curé de la paroisse La Visitation pour accueillir des personnes âgées. Maison Saint Janvier

Mgr Bourget est toujours demeuré très proche des Sœurs de Miséricorde. À sa mort,

Mgr Bourget est toujours demeuré très proche des Sœurs de Miséricorde. À sa mort, il légua plusieurs de ses biens à la communauté. On peut voir aujourd’hui ces objets dans le musée de la Maison mère des Sœurs de Miséricorde.

Mgr Bourget est toujours demeuré très proche des Sœurs de Miséricorde. À sa mort,

Mgr Bourget est toujours demeuré très proche des Sœurs de Miséricorde. À sa mort, il légua plusieurs de ses biens à la communauté. On peut voir aujourd’hui ces objets dans le musée de la Maison mère des Sœurs de Miséricorde.

Mgr Bourget est toujours demeuré très proche des Sœurs de Miséricorde. À sa mort,

Mgr Bourget est toujours demeuré très proche des Sœurs de Miséricorde. À sa mort, il légua plusieurs de ses biens à la communauté. On peut voir aujourd’hui ces objets dans le musée de la Maison mère des Sœurs de Miséricorde.

Il n’est probablement pas erroné de dire que la plupart des Québécois ignorent l’histoire

Il n’est probablement pas erroné de dire que la plupart des Québécois ignorent l’histoire de Rosalie Cadron Jetté et le rôle à la fois surprenant et courageux qu’elle a joué dans l’histoire religieuse et sociale du Québec. Sans un article de journal qui m’avait incité, en juillet 2012, à aller visiter le musée des Sœurs de Miséricorde, elle serait demeurée une inconnue pour moi. Mais en maints endroits dans le monde, son nom n’est pas oublié. Wikipédia révèle en effet l’existence de plusieurs institutions qui commémorent et perpétuent son nom : • L’école Rosalie Jetté, à Montréal, accueille des mères adolescentes âgées de 12 à 19 ans qui peuvent poursuivre leurs études en jumelant leurs rôles de mère et d’élève. • Le Rosalie Manor, à Milwaukee (États Unis), a été fondé par les Sœurs de Miséricorde en 1908. • Le Rosalie Hall, à Toronto, est un centre pour les nouveaux parents. • Le Rosalie Hall, à New York, est un centre de ressourcement pour les adolescentes enceintes ou mères. • La Villa Rosa, à Winnipeg, est un centre de soins pour les mères et leurs bébés. • L’Espoir Rosalie, à Gatineau, est un organisme d’aide pour les femmes monoparentales. • La Petite Maison de la Miséricorde, à Montréal, est un organisme d’aide aux chefs de familles monoparentales féminines.

Lorsqu’il est question du long épiscopat de Mgr Ignace Bourget, les historiens québécois ont

Lorsqu’il est question du long épiscopat de Mgr Ignace Bourget, les historiens québécois ont habituellement recours à une plume acérée en raison notamment de son conservatisme marqué, de sa forte opposition au libéralisme politique et de l’impulsion profonde qu’il a donnée à l’ultramontanisme religieux au Canada français. Pourtant, c’est de la rencontre de ce grand dignitaire instruit de l’Église et d’une pauvre veuve illettrée que fut instituée, pour la toute première fois au Canada français, une communauté de religieuses dont la mission première était d’accueillir et d’aider celles qu’on appelait alors des «filles tombées» , des filles ravalées par la société à de vulgaires débauchées.

En 1881, Mgr Bourget adressait ces mots aux Sœurs de Miséricorde : «Il faut

En 1881, Mgr Bourget adressait ces mots aux Sœurs de Miséricorde : «Il faut faire canoniser votre Mère de la Nativité; il faut que vous ayez assez de foi et de confiance en sa protection, pour en obtenir des miracles, et alors l’Église se prononcera. » En 1989, le cardinal Paul Grégoire, alors archevêque de Montréal, signait le décret d’ouverture de l’enquête canonique sur Rosalie Cadron Jetté. Le 6 novembre 1990, elle se voyait attribuer le vocable de «servante de Dieu» , première des quatre étapes menant à la canonisation Lors du Consistoire du 9 décembre 2013, le pape François a solennellement reconnu ses vertus héroïques et a déclaré Rosalie Cadron Jetté «vénérable» . Elle sera fêtée le 5 avril.

Le tombeau de la Vénérable Rosalie Cadron Jetté ~ Mère de la Nativité

Le tombeau de la Vénérable Rosalie Cadron Jetté ~ Mère de la Nativité

Le tombeau de la Vénérable Rosalie Cadron Jetté ~ Mère de la Nativité

Le tombeau de la Vénérable Rosalie Cadron Jetté ~ Mère de la Nativité

Documentation ▪ Hélène Grégoire, Rosalie Cadron-Jetté – Une histoire d’audace et de compassion ,

Documentation ▪ Hélène Grégoire, Rosalie Cadron-Jetté – Une histoire d’audace et de compassion , Montréal, Centre Rosalie Cadron Jetté, 2007, 94 p. ▪ Wikipédia, Rosalie Cadron-Jetté. ▪ Renseignements pris au Musée des Sœurs de Miséricorde, Montréal, le 7 juillet 2012. ▪ Vincent Garneau, «Les Sœurs de Miséricorde, la crèche Saint Paul» , Courrier Ahuntsic , le 13 septembre 2013. Photographies ▪ R. Day (photographies prises au Musée des Sœurs de Miséricorde) ▪ Web Musique Michel Pépé, «La voie du Juste» (CD Harmonia Celesta) Conception R. Day Septembre 2014 Mes diaporamas sont hébergés sur le site : http: //www. imagileonation. com