Les ides conomiques de la Grce antique la

Les idées économiques de la Grèce antique à la Renaissance : matérialisme et pensée scolastique ECO 3062 Thème 3

Plan � Les idées économiques à l’époque romaine › Essor et déclin de Rome et des idées matérialistes � Les idées économiques au Moyen ge › Les idées économiques des premiers Chrétiens › La pensée économique de Thomas d’Aquin 2

Les idées économiques à l’époque romaine Essor et déclin de Rome et des idées matérialistes 3

Montée et chute de Rome � La République romaine (Ve -27 av. J. -C. ) � L’Empire romain (27 av. J. -C. – 476 ap. J. -C. ) › 313 : l’Édit de Milan par Constantin fait du Christianisme la religion de Rome › 395 divisions des empires d’Orient et d’Occident � 476 éclatement de l’Empire d’Occident et début du Moyen ge � L’Empire d’Orient (Byzantin) lui survivra jusqu’à la chute de Constantinople en 1453 4

Essor de Rome (27 av. J. -C. 180 ap. J. -C. ) � Basé sur l’expansion militaire, qui permet : › La création de grands domaines terriens appropriés par les militaires › L’esclavage des vaincus dans les champs › L’afflux de denrées permet le maintient de la Pax Romana � La Pax Romana : du pain et des jeux › Fait compétition aux grands propriétaires � Nouveau canal d’échange campagne/ville 5

L’État romain � Énormes dépenses › Militaires › Infrastructures (transport, aqueduc, etc) � Financées � Pouvoir par impôts aux provinces politique très centralisé 6

Le droit romain � Premier système juridique indépendant de l’État et de la religion � Apparition d’une classe de juristes � Premier droit donnant préséance aux droits individuels sur les droits collectifs � Peut-être le legs le plus important des romains à la pensée économique… 7

Monnaie et commerce � Union douanière et monétaire + infrastructures Essor du commerce intérieur � Commerce avec les zones périphériques déficitaires › › › Sorties d’or et d’argent Émission de monnaie non noble Perte de confiance Inflation galopante et crise monétaire Apparition du troc au IVe siècle 8

Déclin de Rome (IIe-Ve) � Fin des conquêtes: moteur de la croissance � Perte de productivité des terres › › � Stagnation technologique Atrophie de la petite paysannerie Mauvaise gestion des domaines Pénurie de main d’œuvre et mauvaise condition de vie de cette dernière La montée du Christianisme › Augmentation des affranchissements 9

Les invasions barbares � Fréquente à partir du IIIe › Les Wisigoths (nord-est) › Les Francs (nord-ouest) › Les Vandales (sud) � Augmentation � Difficulté des dépenses militaires dans la perception des impôts 10

Les épicuriens : IVe et IIIe siècles av. J. -C. � Épicure (341 -270) et Lucrèce (94 -56) › Matérialisme, monisme, atomisme, empirisme, déterminisme › Athéisme, affranchissement des croyances par la raison, individualisme � Bonheur = plaisir du corps dans la recherche du bien-vivre (avec modération, dans la contemplation sensorielle) � Absence de pensée politique 11

Les stoïcisme: IVe et IIIe siècles av. J. -C. � Zénon (336 -264) et Cicéron (106 -43) � Bonheur = respect des fins de la nature, d’un certain «ordre naturel» (panthéisme) � Défense du lâcher prise (esprit de résignation) pour atteindre la paix intérieure : « ce qui trouble les hommes ne sont les choses, mais les idées qu’ils s’en font» � Sur certains points, ils annoncent la pensée chrétienne dans sa variante augustinienne › Panthéisme › Tous les hommes égaux devant la nature › Détachement du politique 12

Les idées économiques au Moyen ge Le Moyen ge 13

Le Moyen ge � Haut Moyen ge › mérovingien Ve-VIIIe › Carolingien VIIIe-Xe � Moyen ge central ou classique › Capétien Xe-XIIIe � Bas Moyen ge › Valois XIVe et XVe (voir thème 4) 14

Le Moyen ge � Haut Moyen ge : insécurité › Morcellement du pouvoir conflits internes › Invasions extérieures �Vikings �Arabes › Petits paysans recherchent de la protection d’un seigneur, essor de la féodalité � Moyen ge central : essor de l’économie féodale › Revitalisation des bourgs › Développement du commerce 15

La société féodale � Les seigneurs � Les fidèles � Les serfs � Le clergé � Les artisans et commerçants 16

Les trois formes du servage � Le féodalisme évolue en trois temps › La rente en nature › La rente en $ � La rente en $ (qui est fixée nominalement) a exposé les seigneurs à l’inflation 17

Servage, rente et marxisme � Pour Marx, le servage est le 2 e type de rapport de production basé sur l’exploitation (après l’esclavage et avant le salariat) � Dans le Capital (VIIIe section du livre I), Marx décrit comment la rente en $ et la grande inflation du XVIe a permis l’avènement du capitalisme et du salariat 18

Le pouvoir politique à l’époque féodale � Morcellement des terres du roi en domaines gérés par des seigneurs qui nomment des fidèles… � Les villes sont indépendantes des pouvoirs des seigneurs � Église est la seule puissance internationale appuyée par la structure hiérarchique (roi/seigneurs/fidèles) 19

L’économie féodale � Autosuffisance des petits et des grands propriétaires terriens � Commerce restreint et réalisé par des peuples «spécialisés» dans le grand commerce › Les Juifs, les Syriens, les Grecs et les Flamands › Importation de soieries et d’épices › Exportations de vin, de blé, de sel et de métaux 20

Les bourgs au Moyen ge � Déclinent en même temps que le petit commerce (seul. petits marchés locaux subsistent) � Abritent artisans et marchands, clergé, héritiers de la vie urbaine romaine, etc. � Les plus actives sont les ports et villes fluviales : Venise, Naples, Gênes, Marseille, Narbonne, Arles, Rouen, … � Et celles qui relient l’Europe de l’Ouest à l’Europe centrale : Mayence, Ratisbonne, Cracovie. 21

La «paix de Dieu» (Xe et XIe) � Éclatement de l’Empire carolingien et nouveau millénaire � Protection des gens de l’Église et à tous ceux qui ne portent pas les armes � Protectorat des pauvres: tout chrétien a droit à la protection › Affirmation des droits des serfs › Construction des abbayes � Établit une morale économique › Réforme monétaire › L’argent ne fait pas de petit, mais… �commerce est toléré et le prêt à intérêt est tout de même pratiqué 22

Essor économique au Moyen ge classique (Xe-XIIIe) � Les avancées technologiques � La fixité des rentes encourage à l’effort › Et pousse éventuellement les seigneurs à «vendre» leur liberté aux serfs dans le contexte d’une forte inflation � Apparition d’un surplus dépensé en biens de luxe › Essor des bourgs › Essor de l’artisanat (toiles, vêtements, armes, bijoux, outils agricoles, ferronnerie, etc. ) › Essor du commerce (soieries, épices, etc. ) 23

Avancées technologiques � Permet l’essor de la productivité du travail agricole et la croissance de la population des bourgs › IXe Assolement triennal plutôt que la jachère de la ½ des terres › XIe Moulins à eau et à vent ( «usine féodale» ) �Barrages de rivières › XIIe Collier rigide et cheval › Essor de la métallurgie 24

L’essor des bourgs (Xe-XIIIe) � Multiplication des bourgs et afflux progressif de paysans libérés � Émergence d’une hiérarchie parallèle › Métiers, guildes confréries � Les bourgs se concurrencent bientôt localement dans le «petit commerce» alors qu’ils se concurrençaient auparavant à l’échelle européenne dans le «grand commerce» 25

Essor du commerce (Xe-XIIIe) � Réapparition d’un «petit commerce» villes/campagne � Essor du «grand commerce» avec l’Orient › Grands marchands issus de dynasties familiales › Comptoirs et succursales et coopération › Ex. : la Hanse 26

La monnaie au Moyen ge � D’abord frappée localement par les seigneurs, ce qui entraîne manque de liquidité et inflation, puis émise par les grands marchands � Apparition de la lettre de change (usage généralisé au XIIIe siècle) › Permet à un acheteur de régler avec une reconnaissance de dette › Le vendeur peut la convertir en monnaie locale ou l’endosser pour un tiers à qui il achète › Évite le transport des monnaies et permet de contourner l’interdiction du prêt à intérêt 27

Les croisades � Expéditions entreprises par l’Église catholique en territoire byzantin orthodoxe afin de lutter contre les musulmans › 6 expéditions entre 1095 -1229 � «Détournement» des croisades et essor du commerce méditerranéen � La Politique d’Aristote a été redécouverte par les Arabes au IXe (point de départ de la pensée pol. et. éco. de Thomas d’Aquin) 28

Les idées économiques au Moyen ge Les idées économiques des premiers Chrétiens 29

Origine de la pensée chrétienne � Ancien › › testament : condamnation morale de l’enrichissement de l’usure et du commerce limitation du droit de propriété � Nouveau testament › Condamnation de la richesse › Valorisation du travail manuel 30

Aspects révolutionnaires de la pensée chrétienne � Naissance de la notion d’humanité : «Tous les hommes sont égaux devant la loi de Dieu» � Devrait se traduire aussi par une certaine égalité des conditions › Valorisation du travail manuel › Condamnation, d’abord implicite et plus tard explicite, de l’esclavage, institution au centre de l’économie antique � «que celui qui ne travaille pas ne mange pas» (Paul) 31

Le millénarisme � Les premiers chrétiens auraient pratiqué une forme de communisme � St Jean Chrysostome (347 -407) › Prédit l’avènement du royaume de Dieu sur terre › Croit le communisme plus apte à créer de la richesse › Millenium : règne de 1000 ans du Christ avant le jugement dernier 32

L’augustinisme � St-Augustin (354 -430) � Le salut se trouve dans la cité de Dieu › Condamnation du millénarisme (jugé trop «charnel» ) › Il ne sert à rien de cher le bonheur sur terre › Soumission aux lois de ce monde en attendant le passage à la Cité de Dieu › Non-ingérence de l’Église dans le politique 33

La scolastique (XIIIe-XVe) � Philosophie enseignée dans les universités au Moyen ge › Facultés : théologie, philosophie, médecine, loi � Universités créées à partir du XIIIe › Salamanque, Bologne, Paris, Oxford, Cambridge… › Corporations autogérées bénéficiant d’une grande latitude de la part de l’Église et des rois � Comme les idéalistes grecs, les scolastiques écrivent au moment où l’ordre social qui les a vu naître se désintègre 34

Nominalisme vs réalisme � Débat ontologique sur la nature des «universaux» d’Aristote, marque les débuts de la scolastique � Réalisme : le réel est structuré en lui-même en «universaux» , il suffit de les découvrir › Thomas d’Aquin › Par extension, le terme est souvent associé au matérialisme dont le postulat de base est l’existence du réel en lui-même � Nominalisme : «les universaux» n’existent pas en soi, mais seul. comme l’instrument de l’esprit › Roscelin (XIe et XIIe) et Occam (XIII-XIVe) › Ancêtre du nominalisme scientifique (Wittgenstein) 35

Les idées économiques au Moyen ge La pensée économique de Thomas d’Aquin 36

Thomas d’Aquin (1224 -1274) � � � 1224 : Naît à Naples, fils du comte d’Aquin 1239 : Études à l’Université de Naples et y découvre Aristote 1244 : Devient novice de l’ordre mendiant dominicain, ce qui déclenche l’ire de ses parents 1257 : Doctorat en théologie de l’Université de Paris 1265 : Refuse l’archidiocèse de Naples et débute plutôt la rédaction de la Somme 1273 : cesse d’écrire à la suite d’une dépression 37

Somme théologique (12651273) � Intégration des idées d’Aristote à l’orthodoxie chrétienne � Condamné par l’évêque de Paris en 1277 � Début de réhabilitation en 1323 avec sa canonisation � Au XVIe siècle l’Église s’y rallie officiellement � En 1879 Léon XIII en fait la doctrine officielle de l’Église! 38

Philosophie de Thomas d’Aquin � Théologie surnaturelle (révélation) � Disciplines philosophiques (raison) › Philosophie morale �Éthique �Économique �Politique 39

Structure de la Somme 1. Dieu et la création 2. L’homme et la nature › Section 2 : les actes humains � dont les vertus cardinales (propriété, travail, etc. ) � dont la justice � commutative (juste prix, intérêt, etc. ) � distributive (aumône, etc. ) 3. Le Christ et les sacrements 40

La méthode de la Somme � Succession de questions et d’articles y apportant des réponses � Réponses › › comportent généralement : Aperçu des réponses traditionnelles Liste de difficultés qui leurs sont inhérentes La proposition d’un nouvelle solution L’énumération de ses principales conséquences 41

Le politique � L’homme est de nature sociale et l’État est donc naturel � Puisque le politique fait partie de la philosophie sociale, son étude est acte de raison (non de révélation)… � et elle est donc légitime. Il y a donc coupure avec la position dominante de l’augustinisme 42

Le politique � Primauté individuel du bien commun sur le bien � Soutient la monarchie «ce qui est un par soi fait mieux réaliser l’unité que ce qui est par soi multiple» � Fins de l’État subordonnées à celles de l’Église (conception ministérielle du pouvoir) 43

Le travail � Coupure avec Aristote : le travail est «naturel» et l’homme libre doit condamner l’esclavage � Il éloigne aussi les mauvaises pensées… � Le travail doit aussi primer sur le capital (réitéré par Jean-Paul II en 1981) 44

La propriété privée (Q 66) � Accord avec Aristote : la propriété privée n’est pas en soi «naturelle» , mais elle est justifiée : › On s’occupe mieux de ce qui nous appartient › L’effort est plus grand si l’on peut jouir personnellement de ses fruits › Diminution des sources potentielles de conflits � En cas d’extrême nécessité, la violation de la propriété privée est de plus acceptable 45

La justice distributive (61) � Doit être proportionnée en fonction des titres… � mais pas de jugement moral sur la nature de ces titres et le contexte de leur attribution. � L’Église ira plus tard plus loin en insistant le devoir de charité et en légitimant l’intervention de l’État dans certains cas 46

La justice commutative : le juste prix (Q 77) � On ne doit pas s’enrichir aux dépends des autres, ce qui implique… › Vendre au dessus du juste prix est un péché › Le salaire doit assurer une vie décente � Reste la question d’établir quel est le juste prix… 47

La monnaie et le commerce � Accord avec Aristote: la monnaie est, comme le commerce, une conséquence «naturelle» de la division du travail et de l’échange � Le commerce devient toutefois condamnable si le seul but recherché est l’accumulation 48

Le commerce lucratif (Q 77) � On ne doit pas gagner dans l’échange sauf si… › › › Nécessité de vivre Désir de faire la charité Servir le bien public Amélioration de la marchandise Différences intertemporelles ou spatiales du juste prix Risque � Le «juste prix» s’avère être plutôt élastique � Calvin ira plus loin en ne conservant que le critère de l’intention 49

Le prêt à intérêt (Q 78) � Reprise de l’argument d’Aristote, il n’est pas dans la nature de la monnaie «de faire des petits» � Considère que l’intérêt est le «loyer de l’argent» , le prix à payer pour en détenir › sauf que puisque qu’elle n’a aucune utilité propre, elle ne peut générer de loyer › on ne peut payer pour utiliser quelque chose qui disparaît avec son utilisation (b. fongible) � Conception à la base de la théorie de la préférence pour la liquidité que Keynes opposera à la conception classique selon laquelle il s’agit de la rémunération de l’abstinence 50

Le prêt à intérêt en pratique � Peut être acceptable… › pour se prémunir contre le risque › comme récompense pour un service rendu › si c’est le versement d’une part du profit de l’emprunteur � Comme le commerce, il est toujours condamnable si le seul but recherché est l’accumulation 51

Le prêt à intérêt et l’Église après Thomas d’Aquin (1) � 2 écoles › Les rigoristes qui prônent l’interdiction › Les latitudinaires qui prônent la tolérance � 1311 Clément V interdit le prêt à intérêt et supprime l’ordre des Templiers (créé en 1119 à leur retour des croisades, ils sont devenus banquiers d’Europe) 52

Le prêt à intérêt et l’Église après Thomas d’Aquin (2) � L’intérêt sera officiellement «toléré» par l’Église catholique seulement dans les années 1830 � Chez les protestants › Luther condamnera vivement l’intérêt › Calvin sera plus tolérant 53

Le legs de Thomas d’Aquin � Avec Thomas d’Aquin, les thèses d’Aristote sont reprises et jugées depuis le critère de la «morale chrétienne» plutôt que sur celui de la «nature» � Cette synthèse du compromis deviendra la doctrine officielle de l’Église 600 ans après la Somme � Elle marquera durablement les idées de l’Église notamment avec la doctrine du juste prix et la condamnation du prêt à intérêt 54

La scolastique après Thomas d’Aquin : l’École de Salamanque � Théologiens et juristes du XVIe, dont Francisco de Vitoria, proposant un retour à l’idée d’Aristote de «droits naturels» devant être découverts par la raison � Incarne la transition vers le libéralisme › Reconnaît l’utilité sociale des marchands › Intérêt modéré acceptable � Des économistes autrichiens au XXe, dont Schumpeter, en font des précurseurs de la montée des idées libérales, voire autrichiennes! 55