Travail ralis par Valentin Coirier On garde souvent

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Travail réalisé par Valentin Coirier –

Travail réalisé par Valentin Coirier –

On garde souvent en soi une image négative de la poésie. En effet, ce

On garde souvent en soi une image négative de la poésie. En effet, ce genre littéraire est, dans la plupart des cas, lu seulement pendant la scolarité et on en garde une image peu représentative de ce qu’est réellement la poésie. Il ne reste souvent dans notre mémoire que les souvenirs des apprentissages, parfois laborieux, de poèmes qui nous paraissaient incompréhensibles. D’ailleurs, pour Paul Valery « la plupart des hommes ont de la poésie une idée si vague que le vague même de leur idée est pour eux la définition de la poésie » . La poésie n’est cependant pas une simple accumulation de mots qui ne veulent rien dire ; et les poètes ne sont pas non plus des écrivains sans talent. Bien au contraire. L’art de la poésie est très certainement l’art littéraire le plus complexe, car en plus de composer un texte décrivant et dévoilant leurs sentiments aux lecteurs, les poètes doivent utiliser une multitude de figures littéraires et de subtilités de la langue française pour les renforcer. Octavio Paz disait à ce propos : « les hommes se servent des mots, les poètes les servent » . De plus, un poète doit réussir à travers ses textes à faire voyager le lecteur, lui faire oublier ses soucis, le faire rêver et le plonger dans un autre monde qui est renfermé à l’intérieur même du poète, car, selon Victor Hugo, « un poète est un monde renfermé dans un homme » . Voilà ma définition et ma conception de la poésie. Bien que la poésie soir un style d’écriture très rigoureux dans sa construction, il existe une multitude de poèmes de formes différentes. C’est ce que j’ai essayé de rassembler dans cette anthologie afin de montrer à la fois l’unité et la diversité de la poésie. C’est pour cela que les dix textes figurant dans ce recueil n’ont pas été choisis en fonction de leur auteur, de leur thème ou encore de leur époque, mais plutôt par leur originalité et par le plaisir que j’ai eu à les (re)découvrir. Ce choix basé sur mes goûts personnels, je peux l’expliquer en reprenant les paroles de Paul Eluard qui écrivait que « le meilleur des choix de poèmes est celui que l’on fait pour soit … choisir pour les autres est vain » . De plus la présentation des poèmes et l’ordre dans lequel ils sont disposés est très aléatoire afin de renforcer le contraste qui existe entre ces derniers. Pour conclure sur la présentation de cette anthologie je voudrais expliquer le choix de la présentation des pages suivantes, car à première vue, elle peut paraître étonnante. Pour comprendre le choix du fond de la première page et celui des autres pages, il faut tout simplement s’intéresser à la définition du mot anthologie. Ce terme désigne, d’après le dictionnaire, à la fois un « recueil de morceaux choisis en prose ou en vers » et une « collection de fleurs » ; cela explique donc le choix de l’image.

A une jeune morte Fort Belle, Elle Sort Frêle, Quelle Mort ! Rose Close,

A une jeune morte Fort Belle, Elle Sort Frêle, Quelle Mort ! Rose Close, La Brise L’a Prise. Jules de Rességuier (1788 -1862)

Chanson d'automne Les sanglots longs Des violons De l'automne Blessent mon cœur D'une langueur

Chanson d'automne Les sanglots longs Des violons De l'automne Blessent mon cœur D'une langueur Monotone. Tout suffocant Et blême, quand Sonne l'heure, Je me souviens Des jours anciens Et je pleure Et je m'en vais Au vent mauvais Qui m'emporte Deçà, delà, Pareil à la Feuille morte. Paul verlaine (1844 -1896), Poèmes Saturniens, 1866

La colombe poignardée et le jet d’eau Guillaume Apollinaire (1880 -1918) Calligrammes, 1918

La colombe poignardée et le jet d’eau Guillaume Apollinaire (1880 -1918) Calligrammes, 1918

Chantre Et l'unique cordeau des trompettes marines Guillaume Apollinaire (1880 -1918), Alcools, 1913

Chantre Et l'unique cordeau des trompettes marines Guillaume Apollinaire (1880 -1918), Alcools, 1913

Portrait de Pierre de Ronsard

Portrait de Pierre de Ronsard

Odelette Pourtant, si j'ai le chef plus blanc Que n'est d'un lis la fleur

Odelette Pourtant, si j'ai le chef plus blanc Que n'est d'un lis la fleur éclose, Et toi le visage plus franc Que n'est le bouton d'une rose Pour cela, cruelle, il ne faut Fuir ainsi ma tête blanche ; Si j'ai la tête blanche en haut, J'ai en bas la queue bien franche. Ne sais-tu pas, toi qui me fuis, Que pour bien faire une couronne, Ou quelque beau bouquet, d'un lis Toujours la rose on environne ? Pierre de Ronsard (1524 -1585), Les Odes, 1550

L'Albatros Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,

L'Albatros Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers. A peine les ont-ils déposés sur les planches, Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux, Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches Comme des avirons traîner à coté d'eux. Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule ! Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid ! L'un agace son bec avec un brûle-gueule, L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait ! Le Poète est semblable au prince des nuées Qui hante la tempête et se rit de l'archer ; Exilé sur le sol au milieu des huées, Ses ailes de géant l'empêchent de marcher. Charles Baudelaire (1821 - 1867), Les fleurs du mal , 1861

Édouard Manet, La Négresse (1862 -1863) Huile sur toile 61 x 50 cm

Édouard Manet, La Négresse (1862 -1863) Huile sur toile 61 x 50 cm

Une négresse par le démon secouée Veut goûter une enfant triste de fruits nouveaux

Une négresse par le démon secouée Veut goûter une enfant triste de fruits nouveaux Et criminels aussi sous leur robe trouée Cette goinfre s'apprête à de rusés travaux : À son ventre compare heureuse deux tétines Et, si haut que la main ne le saura saisir, Elle darde le choc obscur de ses bottines Ainsi quelque langue inhabile au plaisir Contre la nudité peureuse de gazelle Qui tremble, sur le dos tel un fol éléphant Renversée elle attend et s'admire avec zèle, En riant de ses dents naïves à l'enfant ; Et, dans ses jambes où la victime se couche, Levant une peau noire ouverte sous le crin, Avance le palais de cette étrange bouche Pâle et rose comme un coquillage marin. Stéphane Mallarmé (1842 -1898)

Portrait de Jacques Prévert

Portrait de Jacques Prévert

Cortège Un vieillard en or avec une montre en deuil Une reine de peine

Cortège Un vieillard en or avec une montre en deuil Une reine de peine avec un homme d’Angleterre Et des travailleurs de la paix avec des gardiens de la mer Un hussard de la farce avec un dindon de la mort Un serpent à café avec un moulin à lunettes Un chasseur de corde avec un danseur de têtes Un maréchal d’écume avec une pipe en retraite Un chiard en habit noir avec un gentleman au maillot Un compositeur de potence avec un gibier de musique Un ramasseur de conscience avec un directeur de mégots Un repasseur de Coligny avec un amiral de ciseaux Une petite sœur du Bengale avec un tigre de Saint-Vincent-de-Paul Un professeur de porcelaine avec un raccommodeur de philosophie Un contrôleur de la Table Ronde avec des chevaliers de la Compagnie du gaz de Paris Un canard à Sainte-Hélène avec un Napoléon à l’orange Un conservateur de Samothrace avec une victoire de cimetière Un remorqueur de famille nombreuse avec un père de haute mer. Un membre de la prostate avec une hypertrophie de l’Académie française Un gros cheval in partibus avec un grand évêque de cirque Un contrôleur à la croix de bois avec un petit chanteur d’autobus Un chirurgien terrible avec un enfant dentiste Et le général des huîtres avec un ouvreur de Jésuite Jacques Prévert (1900 -1977), Paroles, 1949

Picasso, Guernica (1937) Gouache sur toile 780 x 350 cm

Picasso, Guernica (1937) Gouache sur toile 780 x 350 cm

La victoire de Guernica I Beau monde des masures De la nuit et des

La victoire de Guernica I Beau monde des masures De la nuit et des champs II Visages bons au feu visages bons au fond Aux refus à la nuit aux injures aux coups III Visages bons à tout Voici le vide qui vous fixe Votre mort va servir d'exemple IV La mort cœur renversé V Ils vous ont fait payer le pain Le ciel la terre l'eau le sommeil Et la misère De votre vie VI Ils disaient désirer la bonne intelligence Ils rationnaient les forts jugeaient les fous Faisaient l'aumône partageaient un sou en deux Ils saluaient les cadavres Ils s'accablaient de politesses VII Ils persévèrent ils exagèrent ils ne sont pas de notre monde IX Les femmes les enfants ont le même trésor Dans les yeux Les hommes le défendent comme ils peuvent X Les femmes les enfants ont les mêmes roses rouges Dans les yeux Chacun montre son sang XI La peur et le courage de vivre et de mourir La mort si difficile et si facile XII Hommes pour qui ce trésor fut chanté Hommes pour qui ce trésor fut gâché XIII Hommes réels pour qui le désespoir Alimente le feu dévorant de l'espoir Ouvrons ensemble le dernier bourgeon de l'avenir XIV Parias la mort la terre et la hideur De nos ennemis ont la couleur Monotone de notre nuit Nous en aurons raison. VIII Les femmes les enfants ont le même trésor De feuilles vertes de printemps et de lait pur Et de durée Dans leurs yeux purs Paul Eluard (1895 -1952), Cours naturel, 1938

Cinéscénie du Puy du Fou

Cinéscénie du Puy du Fou

Liberté Sur mes cahiers d'écolier Sur mon pupitre et les arbres Sur le sable

Liberté Sur mes cahiers d'écolier Sur mon pupitre et les arbres Sur le sable sur la neige J'écris ton nom Sur chaque bouffée d'aurore Sur la mer sur les bateaux Sur la montagne démente J'écris ton nom Sur le tremplin de ma porte Sur les objets familiers Sur le flot du feu béni J'écris ton nom Sur toutes les pages lues Sur toutes les pages blanches Pierre sang papier ou cendre J'écris ton nom Sur la mousse des nuages Sur les sueurs de l'orage Sur la pluie épaisse et fade J'écris ton nom Sur toute chair accordée Sur le front de mes amis Sur chaque main qui se tend J'écris ton nom Sur les images dorées Sur les armes des guerriers Sur la couronne des rois J'écris ton nom Sur les formes scintillantes Sur les cloches des couleurs Sur la vérité physique J'écris ton nom Sur la vitre des surprises Sur les lèvres attentives Bien au-dessus du silence J'écris ton nom Sur la jungle et le désert Sur les nids sur les genêts Sur l'écho de mon enfance J'écris ton nom Sur les sentiers éveillés Sur les routes déployées Sur les places qui débordent J'écris ton nom Sur mes refuges détruits Sur mes phares écroulés Sur les murs de mon ennui J'écris ton nom Sur les merveilles des nuits Sur le pain blanc des journées Sur les saisons fiancées J'écris ton nom Sur la lampe qui s'allume Sur la lampe qui s'éteint Sur mes maisons réunies J'écris ton nom Sur l'absence sans désir Sur la solitude nue Sur les marches de la mort J'écris ton nom Sur tous mes chiffons d'azur Sur l'étang soleil moisi Sur le lac lune vivante J'écris ton nom Sur le fruit coupé en deux Dur miroir et de ma chambre Sur mon lit coquille vide J'écris ton nom Sur la santé revenue Sur le risque disparu Sur l'espoir sans souvenir J'écris ton nom Sur les champs sur l'horizon Sur les ailes des oiseaux Et sur le moulin des ombres J'écris ton nom Sur mon chien gourmand et tendre Sur ses oreilles dressées Sur sa patte maladroite J'écris ton nom Et par le pouvoir d'un mot Je recommence ma vie Je suis né pour te connaître Pour te nommer Paul Eluard (1895 -1952), Poésies et vérités, 1942