Largument volutionniste de Plantinga contre le naturalisme Roger

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L’argument évolutionniste de Plantinga contre le naturalisme Roger Pouivet Université de Lorraine/LHSP-Archives Poincaré (CNRS)

L’argument évolutionniste de Plantinga contre le naturalisme Roger Pouivet Université de Lorraine/LHSP-Archives Poincaré (CNRS) Institut Universitaire de France

Où se trouve cet argument ? Il a été proposé sous différentes formes par

Où se trouve cet argument ? Il a été proposé sous différentes formes par Alvin Plantinga depuis plus de vingt ans :

Naturalisme (N) Tout ce qui existe : (a) trouve son origine (et sa cause)

Naturalisme (N) Tout ce qui existe : (a) trouve son origine (et sa cause) dans la nature, comme processus aveugle, et (b) doit être étudié selon les méthodes sciences physiques d’aujourd’hui. Dès lors, l’être humain (comme intelligence) résulte d’un processus naturel non finalisé. Il n’existe pas de Providence divine. NB. N n’est pas une théorie scientifique, mais une théorie philosophique et même métaphysique. Le naturalisme est un monisme matérialiste. N est conception devenue dominante dans le monde académique, mais aussi dans les médias. C’est la métaphysique spontanée de l’Occidental qui a fait des études supérieures et eu quelques cours de philosophie…

Théisme (T) Dieu est un être surnaturel, cause externe (créateur), raison d’être et guide

Théisme (T) Dieu est un être surnaturel, cause externe (créateur), raison d’être et guide de tout ce qui existe (maintient dans l’être de la création et providence). Dieu est absolument bon, omniprésent, éternel, toutpuissant, omniscient, nécessairement existant (a se). Théisme plantingien : Dieu est une personne ; Dieu est dans le temps (non immuable).

Théorie de l’évolution (E) Il existe un processus continu de sélection naturelle et d’adaptation

Théorie de l’évolution (E) Il existe un processus continu de sélection naturelle et d’adaptation qui survient sur des mutations génétiques hasardeuses. La plupart des mutations entraînent la disparition des individus ; mais quelques unes sont avantageuses dans la lutte pour la survie. Cela donne à certains organismes un avantage reproductif sur les autres, et éventuellement la nouvelle caractéristique se répand sur une population. Eu égard à ce processus de sélection naturelle et d’adaptation, il n’y a pas de différence entre l’espèce humaine et les autres espèces de vivants.

Fiabilisme (F) Les facultés cognitives sont fiables, au moins s’agissant de certaines opérations cognitives

Fiabilisme (F) Les facultés cognitives sont fiables, au moins s’agissant de certaines opérations cognitives dirigées vers la découverte de la vérité. Facultés cognitives: pouvoirs et capacités grâce auxquels nous formons des croyances et acquérons des connaissances: mémoire, perception, raison, induction, déduction, introspection, témoignage, sensus divinitatis (Calvin), « connaissance confuse mais naturelle de Dieu » (Saint Thomas). Nos facultés cognitives sont fiables quand elles fonctionnent correctement.

Thèse probabiliste (TP) Quelle est la probabilité de F (fiabilisme) sur la base de

Thèse probabiliste (TP) Quelle est la probabilité de F (fiabilisme) sur la base de N (naturalisme) et de E (évolutionisme) ? (La probabilité que F soit vrai étant donné que N et E sont vrais. ) P (F / N&E) est faible

Justification de (TP) ? « Ramené à l’essentiel, un système nerveux permet à un

Justification de (TP) ? « Ramené à l’essentiel, un système nerveux permet à un organisme de faire quatre choses: se nourrir, fuir, se battre et se reproduire. La fonction principale des systèmes nerveux est de maintenir les parties du corps en état pour que l’organisme survive. […] Des améliorations dans le contrôle sensori-moteur confèrent un avantage dans l’évolution : un style de représentation imaginatif est bénéfique pour autant qu’il répond aux besoins du mode de vie de l’organisme et améliore les chances de survie. Mais la vérité, de quelque façon qu’on la pense, ne fait vraiment rien à l’affaire. » Patricia Churchland, « Epistemology on the Age of Neuroscience » , The Journal of Philosophy, vol. 84, October 1987, p. 548 -549

La fiabilité épistémique (intellectuelle), i. e. que du fonctionnement correct de nos facultés cognitives

La fiabilité épistémique (intellectuelle), i. e. que du fonctionnement correct de nos facultés cognitives résultent des croyances majoritairement vraies, n’est une condition ni nécessaire ni suffisante de la survie pour un organisme vivant dans la situation de sélection naturelle. Non seulement nos croyances n’ont pas à être vraies pour qu’elles soient adaptatives, mais nous n’avons même pas à avoir des croyances (possédant un contenu sémantique ayant une valeur de vérité) pour assurer notre survie, en tant qu’organisme, dans le cadre de la sélection naturelle. Dès lors, la probabilité de la fiabilité de nos facultés cognitives sur la base du naturalisme et de l’évolutionnisme est faible (ou ne peut pas être déterminée, i. e. est inexplicable). = P (F / N&E) est faible

Argument (1) TP [P (F/N&E) est faible] (2) TP & (N&E) est un défaiseur*

Argument (1) TP [P (F/N&E) est faible] (2) TP & (N&E) est un défaiseur* de F (3) TP & (N&E) est un défaiseur de N * défaiseur = raison pour abandonner une croyance (et dans certains cas, pour en adopter une autre). Dans certains cas, il y a une incompatibilité rationnelle entre la croyance précédente et le défaiseur ou la nouvelle croyance ; dans d’autres cas, la confiance en une croyance est simplement minée par le défaiseur.

Exemples : Défaiseur réfutant : apprendre que ce qu’on a pris pour un mouton

Exemples : Défaiseur réfutant : apprendre que ce qu’on a pris pour un mouton est un chien Défaiseur sapant : s’apercevoir que ce qu’on regarde a une certaine couleur à cause de l’éclairage Défaiseur de la garantie : les façades en trompe-l'œil

 « D est pour S un défaiseur de la croyance B au moment

« D est pour S un défaiseur de la croyance B au moment t si et seulement si (1) la structure noétique N de S (i. e. , les croyances de S, ses expériences et les relations importantes entre elles) au moment t inclut B, et S en vient à croire D au moment t ; (2) toute personne (a) dont les facultés cognitives fonctionnent correctement à cet égard, (b) dont la structure noétique est N et inclut B, et (c) qui en vient à croire D, et rien d’autre d’indépendant ou de plus fermement crédible, rejette B (ou croit B moins fermement). » A. Plantinga, Warranted Christian Belief, p. 362 -363

Formulation intuitive de l’argument : I. La conjonction du naturalisme et de l’évolutionnisme rend

Formulation intuitive de l’argument : I. La conjonction du naturalisme et de l’évolutionnisme rend très faible (ou au mieux indéterminable) la probabilité que notre esprit soit fiable. II. Dès lors, l’affirmation que le naturalisme évolutionniste est vrai a fort peu de chance d’être correcte, dans la mesure où nous ne sommes pas fiables quand nous faisons cette affirmation. III. Ce qui constitue un défaiseur de la croyance que le naturalisme évolutionniste est correct.

L’argument de Plantinga ne met pas du tout en question l’évolutionnisme. C’est une critique

L’argument de Plantinga ne met pas du tout en question l’évolutionnisme. C’est une critique de l’usage qu’on prétend en faire pour justifier le naturalisme comme thèse selon laquelle tout dans le monde est explicable sans faire appel à l’existence d’un Dieu créateur. L’athéisme naturaliste est auto-contradictoire parce que la vérité de cette thèse est inapplicable dans ses propres termes, puisqu’elle implique la faiblesse de la probabilité de la fiabilité de nos facultés cognitives — fiabilité à défaut de laquelle nous ne pourrions nous assurer que cette thèse est vraie.

Darwin, Lettre à William Graham du 3 juillet 1881 : « J’ai toujours cet

Darwin, Lettre à William Graham du 3 juillet 1881 : « J’ai toujours cet horrible doute s’agissant de savoir si les convictions d’un esprit humain — lequel s’est développé à partir de l’esprit des animaux inférieurs — ont la moindre valeur, ou si on peut même leur faire confiance. Quelqu’un aurait-il confiance dans les convictions d’un esprit simiesque, s’il y a la moindre conviction dans un tel esprit. » (Cité par Alvin Plantinga, Where The Conflict Really Lies, p. 316)

Celui qui accepte le naturalisme se retrouve avec une très bonne raison… de ne

Celui qui accepte le naturalisme se retrouve avec une très bonne raison… de ne pas accepter le naturalisme (une thèse qui est supposée être vraie) ! En revanche, un théiste évolutionniste (non naturaliste) n’aurait aucune raison de douter de sa connaissance de l’évolution. Mais cette évolution est alors guidée par la Providence, et il est lui-même fait pour savoir ce qu’il sait. P (F / T&E) est forte !

L’AECE est une forme d’un argument contre le matérialisme qui se trouve déjà chez

L’AECE est une forme d’un argument contre le matérialisme qui se trouve déjà chez Platon (Phédon), se retrouve dans toute l’histoire de la philosophie, et dont C. S. Lewis a donné une version dans Miracles.

1. Aucune croyance n’est inférée rationnellement si elle peut être expliquée par des causes

1. Aucune croyance n’est inférée rationnellement si elle peut être expliquée par des causes non rationnelles. 2. Si le naturalisme est vrai, alors toutes les croyances peuvent être pleinement expliquées par des causes non rationnelles. 3. Dès lors, si le naturalisme est vrai, alors aucune croyance n’est inférée rationnellement. 4. Une thèse entraînant la conclusion qu’aucune croyance n’est rationnellement inférée n’est acceptable, et sa négation est nécessairement vraie. 5. Donc, le naturalisme doit être rejeté et sa négation acceptée.

Les conditions nécessaires à la logique, aux mathématiques et à la pensée scientifique, en

Les conditions nécessaires à la logique, aux mathématiques et à la pensée scientifique, en tant qu’activités intellectuelles humaines, mais aussi bien à la pensée rationnelle en général, entraînent nécessairement le rejet du naturalisme et du matérialisme. Le naturalisme est métaphysiquement absurde. « Il y a une explication physique répondant à la question de savoir pourquoi, quand je tape ‘’ 3’’, ‘’+’’, ‘’ 5’’, ‘’=’’, sur ma calculatrice de poche, la figure ‘’ 8’’ apparaît sur l’écran. Mais cette explication causale de la forme qui apparaît sur l’écran n’est pas l’explication de ce pourquoi l’instrument produit la réponse correcte. » Thomas Nagel, Mind and Cosmos, p. 48