De la dmocratie sans le peuple au peuple

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De la démocratie sans le peuple au peuple contre la démocratie ?

De la démocratie sans le peuple au peuple contre la démocratie ?

Introduction Définitions de la démocratie : - « Lorsque dans la République, le peuple

Introduction Définitions de la démocratie : - « Lorsque dans la République, le peuple en corps a la souveraine puissance, c’est une démocratie. Lorsque la souveraine puissance est entre les mains d’une partie du peuple, cela s’appelle une aristocratie » (Montesquieu, L’esprit des lois) - « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple » (Abraham Lincoln) - Quod omnes tangit ab omnibus approbetur (ce qui concerne tout le monde doit être approuvé par tous), Code Justinien - « Démocratie signifie seulement que le peuple est à même d’accepter ou d’écarter les hommes appelés à le gouverner » (Joseph Schumpeter, Capitalisme, socialisme

I. Une conception aristocratique de la démocratie ?

I. Une conception aristocratique de la démocratie ?

I-A. Dès l’origine, une double méfiance � 1. Méfiance des élites envers le peuple

I-A. Dès l’origine, une double méfiance � 1. Méfiance des élites envers le peuple • il faut défendre le peuple contre lui-même, ses désirs pouvant être contraires à ses intérêts, et corriger ses erreurs, par l’intermédiaire de ceux qui ont été élus (The Federalist Papers, n° 71 et 63, James Madison) • « Nous sommes forcés de ne voir dans la plupart des hommes que des machines de travail. Cependant vous ne pouvez refuser la qualité de citoyen à cette multitude sans instruction qu’un travail forcé absorbe en entier ; puisqu’ils doivent obéir à la loi, tout comme vous, ils doivent aussi concourir à la faire en donnant leur confiance à quelques-uns d’entre eux » (abbé Sieyès, 7 septembre 1789) � La démocratie est « le plus haïssable, le plus subversif et, pour le peuple lui-même, le plus nuisible des systèmes politiques » (Barnave) � « La majorité des citoyens est capable d’exercer l’oppression la plus cruelle sur la minorité » (Edmund Burke)

� 2. méfiance des classes populaires envers les élites, suspectes de vouloir détourner la

� 2. méfiance des classes populaires envers les élites, suspectes de vouloir détourner la souveraineté • Le club des Cordeliers se définissait ainsi comme « société de défiance et de surveillance » . • La démocratie sociale se nourrira aussi de cette méfiance envers la classe politique (France : anarcho-syndicalisme, charte d’Amiens en 1906)

I-B. Les conséquences � 1. La représentation, incarnation de la démocratie � au XVIIIème

I-B. Les conséquences � 1. La représentation, incarnation de la démocratie � au XVIIIème siècle, la théorie de l’électorat-fonction entraîne logiquement un suffrage censitaire � « Nous devons être gouvernés par les meilleurs… ceux qui possèdent une propriété, qui sont attachés à la tranquillité, qui la conserve, et qui doivent à cette propriété, et à l'aisance qu'elle donne, l'éducation qui les a rendus propres à discuter avec sagacité et justesse […] Un pays gouverné par les propriétaires est dans l'ordre social ; celui où les nonpropriétaires dominent est dans l'état de nature » (Boissy d’Anglas, rapport préparatoire à la Constitution de l’an III, 1795) � James Madison : * les élections ont pour objet de « préciser et élargir les idées populaires par le filtre d’un corps sélectionné de citoyens, dont la sagesse permettrait le mieux de discerner les intérêts véritables de la nation » (The Federalist Papers, n° 10) * l’essence de la république américaine réside dans « l’exclusion totale

Selon Bernard Manin, deux principes séparent les « gouvernements représentatifs » des démocraties antiques

Selon Bernard Manin, deux principes séparent les « gouvernements représentatifs » des démocraties antiques : • le gouvernement représentatif n'accorde aucun rôle institutionnel au peuple assemblé alors qu'à Athènes, chaque citoyen pouvait siéger à l'Ecclésia • Dans une démocratie antique, la plupart des charges publiques étaient pourvues par tirage au sort (et non par élection) Le caractère aristocratique de la sélection est admis, mais les élites ne décident pas du choix : Manin évoque donc la notion, apparemment contradictoire, « d’aristocratie démocratique »

2. Des mécanismes de surveillance et de contre-pouvoir �au sein du système représentatif :

2. Des mécanismes de surveillance et de contre-pouvoir �au sein du système représentatif : constitutionnalisme et la séparation des pouvoirs le �à côté du système représentatif, des procédés de démocratie directe, rendant la parole au peuple : * mandat impératif et mandats courts * recall * référendum

�Donc : « les démocraties contemporaines sont issues d'une forme de gouvernement que ses

�Donc : « les démocraties contemporaines sont issues d'une forme de gouvernement que ses fondateurs opposaient à la démocratie » (Bernard Manin) � « Nous définirons une république, ou du moins ce qu’on peut appeler de ce nom, un gouvernement qui tire tous ses pouvoirs directement ou indirectement de la grande masse du peuple » (The Federalist Papers, n° 39)

I-C. Les problèmes de cette forme de démocratie � 1. Le principe même de

I-C. Les problèmes de cette forme de démocratie � 1. Le principe même de représentation est critiquable - Le représentant crée-t-il le représenté ? (Thomas Hobbes, Pierre Bourdieu) - La délégation constitue-t-elle un détournement de la souveraineté ? (Rousseau) : « la souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle ne peut être aliénée ; elle consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se représente point : elle est la même, ou elle est autre ; il n’y a point de milieu. Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants, ils ne sont que ses commissaires ; ils ne peuvent rien conclure définitivement. Toute loi que le peuple en personne n’a pas ratifiée est nulle ; ce n’est point une loi. Le peuple anglais pense être libre ; il se trompe fort, il ne l’est que durant l’élection des membres du parlement ; sitôt qu’ils sont élus, il est esclave, il n’est rien. Dans les courts moments de sa

� 2. La pratique de la représentation est imparfaite - Désigner une personne n’est

� 2. La pratique de la représentation est imparfaite - Désigner une personne n’est pas démocratique : « Le suffrage par le sort est de la nature de la démocratie, le suffrage par le choix est de celle de l’aristocratie » (Montesquieu, L’Esprit des lois, 1748, Livre II Chapitre II). - Comment le représentant doit-il représenter ses électeurs ? * l’effet-miroir ? (likeness) « L’idée qui nous vient spontanément à l’esprit, lorsque nous parlons de représentants, c’est qu’ils ressemblent à ceux qu’ils représentent : ils doivent être une image exacte du peuple : ils doivent en connaître les conditions de vie et les besoins, ils doivent éprouver ses misères et être enclins à poursuivre ses intérêts véritables ordinaires » (Melancton Smith, Discours à la convention de ratification de New York, 1788). * l’effet de filtre ? « Le but de toute Constitution politique est, ou doit être, d’abord de choisir pour gouvernants les hommes qui ont le plus de sagesse pour discerner, et le plus de vertu pour atteindre au bien public ; ensuite de prendre les précautions les plus élémentaires pour qu’ils restent vertueux pendant la durée de leur mandat »

� Condorcet (député de l’Aisne à la Convention) : « le peuple m’a envoyé,

� Condorcet (député de l’Aisne à la Convention) : « le peuple m’a envoyé, non pour soutenir ses opinions, mais pour exposer les miennes » � Bernard Manin : « le rapport entre représentants et représentés est maintenant perçu comme démocratique alors qu'il fut conçu en opposition avec la démocratie » . � 3. Les effets ne sont pas conformes à l’idéal démocratique - Les élites ne sont pas forcément celles du talent - Les partis politiques jouent-ils vraiment leur rôle ?

II. Quels remèdes, quelles évolutions ?

II. Quels remèdes, quelles évolutions ?

II-A. Une évolution négative de cette forme de démocratie ? • Un désenchantement parmi

II-A. Une évolution négative de cette forme de démocratie ? • Un désenchantement parmi les citoyens des anciennes démocraties : . sentiment d’une certaine impuissance de l’Etat face aux crises économiques et à la mondialisation. demande d’une plus grande participation à l’exercice pratique de la souveraineté (lié à la crise des partis et, plus généralement, des organisations de médiation : désaffiliation partisane). idée que la démocratie représentative vise à détourner la population des luttes sociales

�Théorie de Yascha Mounk : en Occident, le peuple se détourne de la démocratie

�Théorie de Yascha Mounk : en Occident, le peuple se détourne de la démocratie � les citoyens seraient prêts à sacrifier leurs droits politiques (ou une partie) pour conserver leurs droits individuels � plusieurs facteurs fondant la stabilité des démocraties disparaissent lentement : * l’ homogénéité de la domination d’un groupe ethnique ou racial * un soubassement social solide donnant aux citoyens le sentiment de bénéficier du système * la stabilité du système de communication (notamment remis en cause par l’émergence et le développement des réseaux sociaux)

Ces fondements sont remis en cause - Saint-Just : « On n’a point de

Ces fondements sont remis en cause - Saint-Just : « On n’a point de vertus politiques sans orgueil ; on n’a point d’orgueil dans la détresse » (Discours sur les subsistances, Convention, 29/11/1792) - Hannah Arendt : « seuls ceux qui sont délivrés de la nécessité peuvent pleinement apprécier ce que c’est qu’être libre de toute peur, et seuls ceux qui sont libérés du besoin et de la peur sont capables de concevoir une passion pour la liberté publique et de développer le goût particulier pour l’égalité que cette liberté porte en elle » (La liberté d’être libre, p. 56)

�En conséquence, pour Mounk, la démocratie devient moins démocratique : � liberté sans démocratie

�En conséquence, pour Mounk, la démocratie devient moins démocratique : � liberté sans démocratie : libéralismes non démocratiques gouvernés par des élites technocrates excluant le peuple des décisions fondamentales � démocratie illibérale : maintien du principe électoral (parfois réaménagé) mais ne garantissant plus les droits de chacun, à commencer par ceux des minorités

II-B. Quelles évolutions futures ? � 1. Refonder la démocratie représentative ? � En

II-B. Quelles évolutions futures ? � 1. Refonder la démocratie représentative ? � En rénovant le modèle classique : Y. Mounk estime que le remède est : * la restauration de l’Etat Providence * l’éducation, et l’enseignement des vraies valeurs de la démocratie libérale * un patriotisme inclusif � En transformant le modèle classique : passer à la représentation descriptive ?

� 2) Une démocratie autre que représentative ? � La démocratie participative � La

� 2) Une démocratie autre que représentative ? � La démocratie participative � La démocratie délibérative � La démocratie radicale : une ultra-démocratie ? � La démocratie directe ?