Universit BADJI Mokhtar Annaba Facult de Mdecine Annaba
Université BADJI Mokhtar Annaba Faculté de Médecine Annaba Département de Médecine Dentaire Service de Parodontologie La réévaluation en parodontie. Cours pour étudiants de 4ème année Pr BOUDJELLEL Année universitaire 2019/2020 1
Plan 1 - Introduction 2 - Définition de la réévaluation 3 - But de la réevaluation 4 - Les moyens de la réevaluation. 4. 1 - Clinique ØLe contrôle de plaque ØLe saignement au sondage ØUne suppuration récidivante ØLa mobilité 4. 2 - Radiographique 4. 3 - Microbiologique 5 - Les objectifs de la réevaluation 6 - Moments de la réevaluation 6. 1 - Après thérapeutique étiologique 6. 2 - Après une phase chirurgicale 6. 3 - En phase de maintenance Conclusion
1 - Introduction ØLe traitement des maladies parodontales est réalisé par séquences successives. ØL’estimation de chacun des résultats obtenus détermine l’orientation de l’étape suivante. ØCes différentes réévaluations s’effectuent sur les plans clinique, radiographique ou microbiologique après la thérapeutique étiologique, après une phase chirurgicale et en phase de maintenance.
2 - Définition de la réévaluation Les données enregistrées lors de l’examen parodontal initial dans chacun des registres cliniques, radiographiques ou microbiologiques constituent des références à partir desquelles informations ultérieures seront comparées. La réévaluation peut donc être définie ainsi : étape du traitement qui permet d’apprécier l’évolution de la réponse du patient obtenue après une séquence thérapeutique.
3 - But de la réevaluation ØLa chronologie du traitement des parodontites inclut plusieurs étapes successives, chacune d’entre elles dépendant de la séquence précédente. ØLa difficulté majeure réside dans le choix judicieux de ces différentes phases dont les orientations ne peuvent être précisées qu’après estimation de chacun des résultats antérieurs. ØAinsi les différentes étapes et leurs modalités thérapeutiques ne peuvent être établies d’emblée dans leur globalité. ØAfin d’orienter ces diverses décisions, il est donc nécessaire de procéder à des réévaluations successives qui permettent de réadapter le plan de traitement initial en fonction de la réponse tissulaire obtenue par les thérapeutiques précédemment mises en œuvre.
4 - Les moyens de la réevaluation. La réévaluation s’effectue dans trois plans différents: ØClinique, ØRadiographique ØMicrobiologique
4. 1 - Réévaluation clinique L’ évaluation clinique est la première étape indispensable qui permet de confronter les nouvelles données de l’état parodontal aux paramètres initiaux.
Le contrôle de plaque, enseigné lors de la thérapeutique étiologique, est vérifié avant toute nouvelle étape du traitement. Les différents indices mentionnés dans la littérature (Ainamo et Ainamo 1982 ; Axelson et Lindhe 1981 ; Loë 1967) restent des moyens d’investigation indispensables dans un cadre pédagogique ou de recherche. Cependant, l’appréciation clinique demeure raisonnablement suffisante en dehors de ces situations. Cette plaque résiduelle peut être mise en évidence, soit par contrôle visuel, soit en effleurant avec une sonde la surface de la dent, en particulier au niveau cervical (Mac Cracken et coll 2002, Ronderos et coll 2001).
Le résultat peut être exprimé en termes de présence ou d'absence de plaque (Kocher et coll 2002, Rosling et coll 2001). Si dans ce dernier cas l'absence de quantification peut être argumentée, il est cohérent d'admettre que c'est l'élimination de la plaque résiduelle qui est importante à effectuer plus que sa comparaison chiffrée avec le dépôt initial.
L’inflammation est un des signes cliniques fréquemment décelable des maladies parodontales. La couleur de la gencive, le volume, la forme, la consistance et la texture sont modifiés. La recherche de ces signes inflammatoires est fondamentale bien qu’il n’existe pas de corrélation systématique entre la sévérité de l’inflammation, l’importance du dépôt de plaque ou de tartre (Galgut et coll 2002) et la sévérité de la destruction parodontale (Fig 1 a-b-c-d).
Ainsi ces signes n’ont qu’une valeur indicative de suspicion de perte tissulaire mais ne donnent aucune information sur l’état évolutif de la maladie et sur son activité. Devant cette difficulté d’interprétation clinique, la collecte de données plus objectives s’avère nécessaire. Les mesures de la profondeur des poches parodontales (gencive marginale/fond de la poche) et du niveau d’attache (jonction émail-cément/fond de la poche) sont indispensables.
L'appréciation du gain d'attache est l'expression la plus rigoureuse d'une réponse favorable à la séquence thérapeutique effectuée. En effet la jonction émail-cément est une référence fiable de la mesure. L'autre composante commune, le fond de la poche, est en fait le niveau de pénétration le plus apical obtenu sans pression avec une sonde (Engebretson et coll 2002, Camargo et coll 2001). Ainsi, l'appellation niveau d'attache au sondage paraît judicieuse (Egelberg 2001). Cependant, la réduction de la profondeur d’une poche reste la mesure la plus utilisée en clinique.
Cette réduction est interprétée comme étant la somme d’une diminution de l’œdème gingival, d’une tonicité gingivale plus conséquente et de la formation éventuelle de nouvelles fibres conjonctives (Egelberg 2001). Les nouvelles mesures obtenues 6 à 9 semaines après surfaçages sont donc comparées aux mesures obtenues lors du premier sondage réalisé après détartrage supra et sous-gingival. La différence éventuelle entre ces mesures est plus importante que la valeur intrinsèque de chacune des données.
Le saignement au sondage est le reflet d’une inflammation persistante qui peut modifier l’orientation thérapeutique initiale. En effet, ce saignement paraît lié à l’évolutivité de la maladie lorsqu’il est évalué par sites (Adler et coll 1994 ; Lang et coll 1986).
Mais un consensus existe pour reconnaître que l’absence de saignement au sondage est un signe fiable de stabilité de la santé parodontale (Lang et coll 1990) (Fig 2 a-b). Fig. 2 : La diminution de l'inflammation gingivale après thérapeutique étiologique se traduit par une absence de saignement au sondage qui reflète une stabilité de la maladie (2 a). En dépit d'un contrôle de plaque efficace et d'une réponse tissulaire globalement satisfaisante, il persiste au niveau de ce site un saignement au sondage et une poche profonde (2 b). La gestion thérapeutique de cette situation est liée à l'accessibilité de la lésion
Une suppuration récidivante au niveau de certains sites est associée à un risque élevé de progression de la pathologie (Claffey et Egelberg 1995) et est considéré comme un signe clinique d’activité. Dans ce cas, le traitement est focalisé sur l’éradication de cette suppuration avant tout autre objectif.
La mobilité n’est pas le reflet d’une pathologie mais le résultat d’une adaptation à une situation clinique (Lindhe 1997). Seule une mobilité augmentée dans le temps a une valeur d’indication de l’évolution de la maladie (Demirel et coll 1997), pour autant que la valeur initiale puisse être valablement quantifiée. Sur ce point et mises à part des études épidémiologiques ou réalisées dans un but pédagogique, l’appréciation clinique, à l’aide de deux manches d’instruments, peut être raisonnablement admise.
Ainsi la notion de mobilité réversible est-elle prépondérante en termes de réponse favorable au traitement. Au cours des réévaluations, l’occlusion est contrôlée sans pour autant être le composant essentiel de l’objectif thérapeutique (Nunn et Harrel 2001 ; Harrel et Nunn 2001).
4. 2 - Réévaluation radiographique ØLa réévaluation radiographique permet d’apprécier la stabilisation ou non du niveau osseux, les éventuelles densifications osseuses et la netteté des corticales. ØLes analyses de la perte osseuse et des corticales sont associées bien que les radiographies sous-estiment la situation réelle (Machtei et coll 1997). ØEn effet, la perte osseuse radiographique présente un retard de 6 à 8 mois par rapport à la perte d’attache clinique (Hausmann et coll 1994).
ØEn l’absence de modifications cliniques suspectes, un bilan complet est établi tous les 3 ans. ØCependant les sites à risque peuvent faire l’objet d’un suivi radiographique plus rapproché et des clichés rétroalvéolaires sont alors réalisés tous les 6 mois. ØC’est d’ailleurs cette fréquence qui est retenue, afin d’apprécier les modifications osseuses, pour les sites ayant été l’objet d’une thérapeutique à visée réparatrice ou régénératrice (Fig 7 a-b-c).
ØL’intérêt de cette réévaluation réside dans la comparaison des clichés (Fig 3 a-b). Fig. 3 : La réévaluation radiographique six mois après traitement étiologique permet de constater une réparation de la lésion initiale profonde située entre les deux incisives centrales mandibulaires. L'objectif initial était d'obtenir la temporisation d'une situation d'urgence car le pronostic de conservation dentaire s'avérait réservé. L'amélioration des conditions cliniques a encouragé la poursuite du traitement étiologique bien que ce type de résultat reste difficilement prévisible à l'origine
ØCompte tenu de la complexité d’établir des clichés rigoureusement superposables, la prise de radiographies rétroalvéolaires avec angulateur et long cône reste le minimum exigé. ØL’examen panoramique peut être utile en tant que dépistage mais manque de précisions comparatives sur le plan parodontal (Pepelassi et coll 2000).
4. 3 - Réévaluation microbiologique ØL’examen microbiologique, cultures et/ou sondes, est un outil diagnostic complémentaire qui peut être utilisé lors des différentes réévaluations lorsque la réponse du patient n’est pas conforme aux résultats escomptés ou lorsqu’une récidive est suspectée (Van Winkelhoff et coll 1996). ØEn effet, la recolonisation d’un site reste une situation toujours envisageable. ØL’analyse bactérienne permet dans ces cas d’identifier des agents pathogènes et de cibler ainsi une antibiothérapie adaptée.
Dans les cas de parodontites agressives, pour lesquels une antibiothérapie aura été jugée nécessaire dans le cadre de la thérapeutique étiologique (Mombelli 1998), l’analyse bactérienne permet de vérifier l’éradication des organismes pathogènes. Une relative prudence doit cependant être de mise car des études récentes montrent que les résultats sont inconstants quant à la fiabilité de ces tests (Egelberg 2001 ; Mellado et coll 2001 ; Meyer et coll 1997). Dans le même cadre, et avec la circonspection qui se doit, un test génétique peut-être utilisé dans l’évaluation globale des risques (Socransky et coll 1998 ; Kornman et coll 1997).
5 - Les objectifs de la réevaluation. L’évaluation des modifications tissulaires obtenues ou non, après une phase thérapeutique, doit donc s’effectuer à différents stades du traitement parodontal (Tableau I).
Tableau I : Les objectifs de la réevaluation. Réévaluation après thérapeutique étiologique Réévaluation après chirurgie Réévaluation en maintenance • Evaluer la coopération du patient • Evaluer les résultats • Vérifier que l’objectif est atteint • Contrôler la stabilité • Evaluer les résultats à long terme • Evaluer la réponse tissulaire du patient • Poursuivre ou modifier le plan de traitement • Intercepter une récidive • Préciser la nécessité d’outils diagnostics complémentaires • Orienter la suite du plan de traitement • Modifier une fréquence de maintenance
6 - Moments de la réevaluation En parodontie, la réevaluation peut être effectuée: Øaprès thérapeutique étiologique Øaprès une phase chirurgicale Øen phase de maintenance
6. 1 - Réévaluation après thérapeutique étiologique La première réévaluation est réalisée 6 à 9 semaines après la fin de la thérapeutique étiologique. Ce délai est nécessaire, après surfaçages radiculaires, pour obtenir une cicatrisation de l’attache épithélio-conjonctive (Beuchat et coll 2001). Cette première réévaluation a plusieurs objectifs. Effectivement, la thérapeutique étiologique qui comprend l’enseignement du contrôle de plaque, des détartrages supra et sous-gingivaux et des surfaçages radiculaires, constitue une phase primordiale du plan de traitement parodontal.
Dès lors, il devient impératif d’évaluer l’indispensable coopération du patient sans laquelle le traitement ne peut-être mené à bien. L’appréciation de la réponse tissulaire à cette séquence thérapeutique est également un pré-requis qui va permettre d’appréhender la capacité de réponse de l’hôte, mais qui peut aussi préciser, en dépit des réserves mentionnées, l’utilité d’outils diagnostics complémentaires tels les tests bactériens ou génétiques, si la réponse obtenue ne paraît pas conforme à l’estimation initiale. Enfin, l’orientation de la suite du plan de traitement constitue la décision majeure de cette première réévaluation. Ce moment est crucial car il détermine le bien fondé de passer à une phase suivante du traitement.
Différentes situations peuvent se présenter lors de cette première réévaluation (Tableau II) :
6. 2 - Réévaluation après une phase chirurgicale La deuxième réévaluation intervient après chirurgie parodontale lorsque cette phase aura été jugée nécessaire. Une première évaluation des résultats obtenus ne peut se faire avant 3 mois, délai minimum de cicatrisation (Bouchard et Etienne 1993). Il est alors impératif de vérifier, avec les moyens cliniques et radiographiques mentionnés, que l’objectif, fixé avant la phase chirurgicale, est en voie d’être atteint et que les résultats sont conformes aux prévisions. Dans cette situation, la thérapeutique de maintenance est engagée. En cas de résultats non conformes ou non satisfaisants, l’objectif thérapeutique est modifié et géré dans le sens de la situation nouvellement acquise en tenant compte d’un pronostic réservé.
6. 3 - Réévaluation en phase de maintenance Des séances de maintenance sont nécessaires tous les 3 à 6 mois (Nabers et coll 1988). A cette occasion, seules des réévaluations permettront de contrôler la stabilité obtenue, d’évaluer les résultats à long terme (Fig 7 a-b-c), mais aussi de modifier une fréquence de maintenance voire d’intercepter une éventuelle récidive (Fig 1 c-d). Ainsi les objectifs fixés lors des différentes réévaluations mettent en évidence l’enjeu de cette phase du traitement (Tableau II). Sans cette analyse, l’adaptation judicieuse du plan de traitement ne peut valablement s’effectuer (Tableau IV).
Tableau IV : Les réévaluations parodontales : synthèse Réévaluation clinique Réévaluation radiographique Réévaluation microbiologique Quand • Après chaque étape du traitement • En contrôle postchirurgical à 6, 12 ou 18 mois • En phase de maintenance tous les 3 ans (sauf modifications cliniques) • Réponse tissulaire non conforme aux résultats escomptés • Après traitement étiologique • Après phase chirurgicale • En phase de maintenance Comment • Examen clinique • Sondage • Radiographies rétroalvéolaires • Cultures • Sondes Quoi • Contrôle de plaque • Caractéristiques gingivales • Profondeur de poche/niveau d’attache • Saignements, suppuration • Mobilité • Niveau osseux • Variations de la densité osseuse • Corticales • Détection de germes pathogènes soit résiduels soit issus d’une recolonisation
Fig. 7 : L'évaluation post-chirurgicale permet de vérifier que l'objectif initial est atteint mais le point essentiel reste la confirmation de la stabilité dans le temps des résultats postopératoires acquis. La réévaluation radiographique des lésions intra-osseuses (7 a) traitées par comblement (Bio-oss collagène®) met en évidence, après un an, une réparation osseuse avec persistance du bio-matériau (7 b). Après trois ans, la stabilité du résultat est confirmée (7 c).
Conclusion La spécificité du traitement des maladies parodontales réside dans le fait que ce traitement est effectué par étapes successives et que chaque séquence dépend du résultat précédent. Ainsi la comparaison entre les différents paramètres utilisés est-elle plus significative que la valeur intrinsèque de chacun d’entre eux. Cette appréciation permet d’adapter le projet initial aux différentes réponses du patient et aux réelles possibilités de gestion thérapeutique. L’adéquation entre objectifs envisagés, réponses estimées et résultats acquis reste la finalité essentielle des réévaluations parodontales.
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