Un fil conducteur original Le documentairevido Svalbard 78
Un fil conducteur original Le documentaire-vidéo Svalbard 78° Lat. N présente la façon dont vivent des scientifiques en région subpolaire pour y étudier les glaciers. Les avatars de la vie quotidienne ainsi que les aléas de la recherche scientifique sur le terrain sont intimement liés, illustrant ainsi les difficultés de tous ordres résultant des conditions sévères du milieu. Un nécessaire humour et une convivialité chaleureuse permettent aux explorateurs modernes que sont les scientifiques de terrain de supporter ce milieu austère mais de toute beauté. L'histoire racontée est construite comme une sorte de "zoom" allant du général au spécifique : d'une description à caractère anecdotique des lieux, des gens et des choses à l'objectif pointu de nos recherches, l'hydrologie glaciaire. Malgré cette approche, ce vidéogramme entre dans la catégorie des documents pouvant servir de support pédagogique. En effet, son visionnement devrait naturellement susciter des interrogations et des comparaisons, tant les images montrent un univers différent de celui des citadins que nous sommes. De ce fait, après une mise en perspective du Svalbard -- terme et terre exotiques à souhait -- nous présentons une suite de notes expliquant et, parfois, amplifiant les séquences du vidéogramme. Les paragraphes sont articulés sur des arguments ou des questions simples qui constituent autant de points forts aiguisant la curiosité de tout un chacun. Pour qui veut pratiquer une géographie amusante, de petits exercices sont proposés avec toujours comme objectif une compréhension simple mais la plus objective possible des divers phénomènes naturels rencontrés.
Mode d'emploi suggéré Rire des facéties des protagonistes, puis réfléchir avec eux : • En essayant de trouver des réponses aux questions posées. • En consultant, pour en savoir plus, les définitions des principaux termes utilisés. Ceux-ci apparaissent en gras dans le texte, là où ils sont commentés. • En faisant des comparaisons avec la région où vous vivez, tant du point de vue géographique, environnemental, qu'historique. Chaque fois que cela est nécessaire, le minutage est inscrit en regard des illustrations de l'application multimédia. Ensuite, il ne restera plus qu'à apprécier la beauté du monde. . . dans sa diversité
Le Svalbard est un archipel appartenant à la Norvège Cet ensemble d'îles est libéré de la banquise arctique chaque été grâce à un courant marin "chaud" provenant du Gulf Stream et "montant" vers le nord après avoir longé les côtes de la Norvège. L'extrémité méridionale du Svalbard se trouve à 600 km au nord de la Scandinavie, tandis que son extrémité septentrionale n'est qu'à 1 000 km du pôle Nord! Remarque: En cliquant sur l'image, il est possible de la consulter à une échelle plus grande; celle -ci risque cependant de prendre plus de temps à afficher. De plus, il est possible que vous ayez à vous déplacer avec les ascenceurs pour visionner l'image complètement; ceci dépend de la dimension ainsi que de la résolution de votre moniteur d'affichage.
La plus grande île de l'archipel du Svalbard s'appelle le Spitzberg C'est là que l'action se passe! Composé de quatre grandes îles et d'une multitude d'îlots, le Svalbard a une superficie totale de 63 000 km carrés, dont 39 000 km carrés pour le Spitzberg. L'archipel est couvert à 60 % par des glaciers. Et dans la région étudiée (Hornsund), les glaciers couvrent plus de 75 % du territoire.
Le Spitzberg, une sorte de pointe de pizza dans une boîte de 200 km sur 400 km! Le Spitzberg peut paraître modeste en superficie; pourtant, si on le compare à nos régions, on constate que cette île est plus grande que la Gaspésie et l'île d'Anticosti réunies! Ou bien, qu'elle équivaut à la péninsule de Nouvelle-Écosse; ou encore qu'elle s'étend sur une distance égale à celle séparant Montréal de Boston!
Mais d'où viennent ces noms de lieux étranges ? C'est une histoire à éclipses. Le Svalbard est signalé pour la première fois en 1194, dans une saga islandaise racontant les exploits descendants des Vikings norvégiens installés en Islande. Toutefois, cette information se perd. Si bien que, au XVIe siècle, lorsque les grandes puissances européennes cherchent à atteindre Catay, la Chine mythique de Marco Polo, pour y faire du commerce, les mers nordiques sont explorées par des marins hardis à la recherche d'un passage par le nord-est du continent européen. Willem Barents, commandité par les riches marchands d'Amsterdam, est l'un d'eux. Le 17 juin 1596, il arrive en vue des côtes du Svalbard et le commandant Gerrit de Veer, qui écrivit la relation de ce voyage tragique (puisque Barents y périt), s'exprime ainsi : "La terre estait pour la plus part rompue, bien haulte et non autre que montagnes pointues, pourquoi l'appellions Spitzbergen. "
Le Spitzberg, ou le pays des montagnes pointues (spitzbergen), est souvent confondu avec le Groenland durant les deux siècles suivants. En effet, le front de la banquise unit ces deux terres (Carte de localisation du Svalbard). On y pratique la chasse intensive aux divers mammifères marins, à l'ours polaire et au renard arctique dont les fourrures sont fort prisées. En 1610, la "Compagnie de Moscovie", sise à Londres, envoie à son tour Henry Hudson vers le nord. Le capitaine Jonas Poole commande l'Amitié, qui vient mouiller à l'entrée d'un bras de mer du Spitzberg. Ses marins rapportent de terre de nombreuses cornes (horn). Mais un vent violent, soufflant de l'intérieur des terres dans l'axe du bras de mer, écourte cette visite et convainc Jonas Poole qu'il se trouve à l'entrée du détroit (sound) barré par la glace. Hornsund restera le nom de ce bras de mer qui n'est pourtant qu'un fjord, c'est-à-dire une vallée que les glaciers ont surcreusée avant qu'elle ne soit envahie par la mer.
Carte des côtes du Spitzberg publiée à Londres en 1625 Durant trois siècles, le Svalbard va être le théâtre de l'abattage de milliers de mammifères marins et terrestres tous les ans. Ce territoire très fréquenté reste néanmoins une Res nullius, c'est-à-dire une terre sans maître, jusqu'au XXe siècle. Aucun indigène n'y fut jamais rapporté. Ce terme de diplomatie (res nullius) a évidemment disparu de nos jours, toutes les terres émergées du globe terrestre ayant été explorées! À la fin du XIXe siècle cependant, Norvégiens, Russes, Anglais, Américains et d'autres se mettent à y exploiter des gisements de charbon. Au fond du plus grand fjord de l'île, une mine prend un essor remarquable dès 1906, grâce à une compagnie dirigée par un homme d'affaires américain: J. M. Longyearbyen, c'est-à-dire "le village de Longyear" en norvégien, est né et deviendra le centre administratif de l'archipel du Svalbard, sous juridiction norvégienne à partir de 1920. Auparavant, le site s'appelait Advent-Bay.
La terre tourne comme une toupie sur une table L'axe de la terre-toupie forme un angle de 66° 1/2 avec le plan de la table appelée écliptique, c'est-à-dire le plan de révolution de la terre autour du soleil. La position de la terre par rapport au soleil représentée sur la figure est celle observée au solstice d'hiver le 21 ou le 22 décembre.
Comment localiser un lieu? La terre est un volume proche de la sphère qui tourne sur elle-même. Ce mouvement s'appelle la rotation. Tout point de sa surface peut être défini par deux coordonnées : sa latitude et sa longitude. La latitude d'un point se mesure en degrés et représente la distance angulaire entre l'équateur et ce point. On se souvient évidemment que l'équateur est le grand cercle de la terre perpendiculaire à son axe de rotation. . . et les pôles, les extrémités de cet axe! De Montréal au Svalbard, on passe à des latitudes de plus en plus élevées (45° 1/2 à Montréal, 78° à Longyearbyen). Le refroidissement du climat causé par la différence de latitude est évident d'Oslo à Longyearbyen. Ainsi, à partir d'Oslo, l'avion vole vers le nord et l'on observe : • à Oslo (60° lat. N) : chaleur printanière, arbres et végétation; • à Tromsø (69° lat. N) : neige, mais mer pas gelée et végétation existante; • à Longyearbyen (78° lat. N) : neige, glace, pas d'arbres.
Mais alors, pourquoi "l'hiver n'en finit-il pas à Montréal", située à 45° 1/2 de latitude N? La circulation des courants marins froids venant de l'océan Arctique; tandis que les façades ouest (ex. : la Norvège) sont réchauffées par des courants marins chauds (ex. : le Gulf Stream) venant des zones tropicales. →Voilà pourquoi Oslo, située à près de 15° de latitude plus au nord, jouit d'un printemps précoce par rapport à Montréal.
Le réchauffement dû au Gulf Stream affecte le climat de toute la Norvège La séquence musicale, dédiée au grand cinéaste suédois I. Bergman, permet d'observer que, au pied des pics enneigés, sous la lisière de la forêt, la mer est libre de glace. Les bateaux de pêche y circulent. . . Un de ceux-ci est visible au travers des séchoirs à morues traditionnels. Et pourtant, le paysage filmé (Tromsø) se situe en latitude plus proche de la banquise arctique de Montréal! Le front de la banquise en août se situe à environ 81° de latitude N (Carte de localisation du Svalbard), Tromsø est à 69° de latitude N et Montréal, à 45° 1/2 de latitude N.
Tromsø se trouve au nord du cercle polaire Le cercle polaire est un parallèle dont la latitude équivaut à l'angle d'inclinaison de la terretoupie sur son plan de révolution (Latitudes lieux visités). C'est-à-dire qu'à cette latitude (66° 1/2), une fois l'an, le jour est long de 24 heures. C'est le solstice d'été (21 ou 22 juin). Nous sommes donc à la limite du pays du soleil de minuit. Et pour chaque degré gagné en latitude, le nombre de jours durant lesquels le soleil ne se couche pas -- car il fait le tour du ciel -- augmente de 6! Puisque Tromsø est située à 69° de latitude N, on y compte 6 jrs x 2° 1/2 = 15 jours par an éclairés en permanence par le soleil. Après cette période d'éclairage permanent, les jours raccourcissent progressivement.
Au solstice d'hiver (21 ou 22 décembre), soit six mois plus tard, la terre-toupie a parcouru la moitié de sa révolution autour du soleil. Cependant, son angle de rotation fait toujours le même angle de 66° 1/2 avec la table-plan de l'écliptique. Au 21 ou 22 décembre, toutes les régions au nord du cercle polaire arctique sont alors dans l'ombre de la terre : c'est la nuit polaire. . . et celle -ci va durer d'autant plus longtemps qu'on se situe à des latitudes plus élevées Ce tableau présente, pour diverses latitudes du Svalbard, le nombre de jours durant lesquels le soleil parcourt le ciel en permanence et la période de nuit polaire correspondante. Latitude Soleil de minuit Nuit polaire Nord 12 -04 au 30 -08 = 19 -10 au 21 -02 = 81° 141 jrs 128 jrs 21 -04 au 21 -08 = 25 -10 au 17 -02 = 79° 123 jrs 110 jrs 77° (base 24 -04 au 18 -08 = 31 -10 au 11 -02 = polonaise) 117 jrs 104 jrs 30 -04 au 12 -08 = 06 -11 au 05 -02 = 75° 105 jrs 92 jrs
Le soleil continue à éclairer grâce à la réfraction ~Questions pour les futés~ 1. Mais pourquoi donc la période des jours durant lesquels le soleil ne se couche pas est-elle plus longue d'environ deux semaines que la période de nuit polaire à latitude équivalente? Jusqu'ici, le point de vue géométrique nous permettait d'élaborer une explication valable pour comprendre les différences de longueur entre le jour et la nuit. Il faut maintenant faire un peu de physique! En effet, la terre-toupie est éclairée par le soleil, mais les rayons de celui-ci, après un long voyage dans le vide sidéral, passent au travers d'un corps transparent, l'atmosphère, avant d'atteindre la surface du globe. En changeant de milieu, les rayons solaires subissent une déviation appelée réfraction. Si bien que le soleil est toujours visible alors qu'il se situe géométriquement sous la ligne d'horizon de l'observateur. D'où la plus longue période d'ensoleillement par rapport à la nuit polaire en un même lieu! C'est tellement vrai qu'on observe que le soleil doit être 18° sous la ligne d'horizon pour cesser d'éclairer par réfraction!
→ Même situé géométriquement sous le prolongement de la ligne d'horizon, le soleil continue à éclairer grâce à la réfraction de ses rayons dans l'atmosphère terrestre.
2. Aux latitudes de quels lieux au Canada correspondent les villes norvégiennes et le Svalbard? Ainsi, Oslo est à la même latitude que la baie d'Ungava. Sachant qu'un degré de latitude représente une distance d'environ 111 km, calculer en kilomètres la différence de latitude entre Montréal et Oslo, par exemple. 3. Et les longitudes dans tout cela? S'approchant du pôle Nord, il était normal qu'on parle beaucoup de latitude. Il faut cependant se rappeler que, pour connaître la position d'un point situé à une latitude donnée, il est nécessaire de découper la surface du globe terrestre par des méridiens, grands cercles passant par les pôles. La longitude d'un lieu équivaut à la distance angulaire entre un méridien de référence et celui qui passe par le lieu étudié. Elle se mesure donc en degrés vers l'est ou l'ouest, à partir du méridien qui passe par Greenwich, en banlieue de Londres.
Où est l'anomalie sur la photo? Le renne du Svalbard (Rangifer tarandus platyrhynchus) est le seul mammifère indigène de l'archipel avec l'ours polaire et le renard arctique. Protégé de la chasse depuis 1925, le renne compte aujourd'hui près de 10 000 individus. . . après avoir manqué de disparaître au début du siècle à la suite d'une chasse excessive. Plus petit que le renne européen, cet animal extrêmenent résistant emmagasine de la graisse en se nourrissant l'été de lichens, de mousses et de plantes vasculaires, seule végétation du Svalbard. Il y a une anomalie sur la photo présentée. Quelle est-elle? Le sapin planté à droite du renne a été importé du continent pour les fêtes de Noël. En avril, il est temps de le mettre dehors! Il n'y a ni arbuste ni arbre capables de pousser sur l'archipel du Svalbard. Seul le saule nain rampant (Salix polaris) représente l'espèce arbustive. . . sous forme de feuilles au ras du sol.
Mais alors, d'où vient le bois nécessaire pour la construction des cabanes? Puisqu'il n'y a pas d'arbres au Svalbard, le bois de construction est importé soit par les humains depuis quatre siècles. . . , soit par les courants marins de l'océan Arctique depuis des millénaires. En effet, ces courants marins, se déplaçant dans le sens horaire le long des côtes de Sibérie, poussent vers les côtes du Svalbard tous les arbres déracinés et emportés par les grands fleuves sibériens se jetant dans cet océan.
Les glaciers : une famille disparate On trouve des glaciers en périphérie des pôles et dans les montagnes, là où l'altitude est suffisamment élevée pour qu'ils s'y génèrent. Les glaciers ont un volume actuel de trente millions de km cubes. . . Cependant, 90 % de ce volume est concentré sur le continent antarctique. En chiffres arrondis, les glaciers occupent une surface de presque 15 000 km carrés, soit une superficie équivalant à 1, 5 fois celle du Canada. Cependant, l'Antarctique compte dans ce bilan pour près de 12 600 000 km carrés, et le Groenland pour plus de 1 700 000 km carrés!
Inlandsis, calotte glaciaire, plate-forme de glace flottante, . . . Les glaciers sont classés en fonction de leur étendue et de leur dynamique: • Inlandsis : glacier de plus de 50 000 km carrés dont l'épaisseur dépasse 2 000 m. • Calotte glaciaire : glacier de moins de 50 000 km carrés de superficie. Si ces énormes masses de glace atteignent la mer, elles y forment une plate-forme de glace flottante. Par contre, sur la terre ferme, ces masses de glace se prolongent par des glaciers émissaires. Ces glaciers émissaires ressemblent alors aux glaciers de vallée naissant aux flancs de montagnes, dans un cirque, avant de s'allonger plus ou moins en une langue qui se termine souvent dans la mer au Svalbard, ou parfois sur terre, comme dans les régions de hautes montagnes tempérées (Rocheuses, Alpes, etc. ).
À cher. . . À trouver À cher Comment cela est-il possible que la pollution de l'air soit perceptible dans les régions polaires? Quelles sont la nature et l'origine des polluants véhiculés dans l'atmosphère? À trouver Combien de langues différentes les glaciologues parlent-ils? Si on inclut le basque, ils parlent dix langues différentes! Pourquoi Claude, le compagnon spéléologue, perd-il sa pelle en creusant la neige? La neige pelletée s'est accumulée durant l'hiver et couvre les gouffres creusés par l'eau dans la glace l'été précédent. Ayant fait l'excavation trop près du gouffre, Claude n'a pas pu retenir sa pelle lorsqu'il s'est trouvé au sommet du gouffre. Celui-ci avait 70 m de profondeur l'été précédent!
Mais pourquoi descendre au cœur des glaciers? L'objectif scientifique de nos recherches est d'étudier comment se fait le stockage de l'eau dans le corps du glacier. En effet, en été, le glacier Hans perd un mètre d'épaisseur en moyenne dans sa zone d'ablation, c'est-à-dire sa partie inférieure, où la fonte et de la neige et de la glace est annuellement plus importante que l'accumulation à la suite des précipitations des neiges hivernales. La zone d'ablation du Hansbreen couvre environ les 2/3 inférieurs de sa surface. Le 1/3 amont du glacier constitue la zone d'accumulation, c'est-à-dire la zone où se génère plus de glace qu'il ne s'en perd. L'eau provenant de la fonte de la neige et de la glace à la surface du glacier se concentre en ruisseau dont les chenaux méandrent à la surface du glacier avant d'aboutir à un gouffre agrandissant une crevasse. Le chenal s'appelle la bédière et le gouffre taillé par l'eau dans la glace, le moulin. Comme le Hansbreen se jette dans la mer, et que toute fonte. . . et tous mouvements de la glace s'arrêtent durant l'hiver polaire, on prévoyait que le corps du glacier aurait eu le temps de se vider de l'eau accumulée au cours de l'été. Actuellement, l'exploration directe des moulins est la plus efficace pour obtenir des informations et sur le stockage de l'eau de fonte et sur la morphologie des vides qui contiennent ces eaux.
Enfin, la connaissance plus fine de la rétention en eau des glaciers permet de mieux comprendre leur comportement général. En effet, l'eau sert de lubrifiant pour faciliter la reptation des glaciers. →On trouvera une synthèse des explications données dans le vidéogramme un peu plus loin dans cette application. →D'après les arguments présentés ci-dessus, reconnus par la communauté des glaciologues, on s'attendait à trouver le corps du glacier libre des eaux de fonte.
L'ours polaire est le roi de l'archipel Protégé complètement depuis 1976, l'ours polaire (Ursus maritimus) est le roi de l'archipel. On en compte aujourd'hui environ 5 000 sur tout l'archipel. Il reste généralement le long des côtes sur les glaces flottantes d'où il chasse le phoque, sa nourriture habituelle. Mais, infatigable, il est capable de traverser les chaînes de montagnes pour gagner l'est du Spitzberg à la fin de l'hiver, car les courants marins froids maintiennent plus de glace flottante qu'à l'ouest. Puis, à l'arrivée de la nuit polaire, il migre en suivant le regel de la côte ouest. Si bien que, chaque année, il en passe plus de 200 aux environs de la base polaire polonaise. Ces ours suivent ainsi l'axe du fjord de Hornsund pour passer d'ouest en est du Spitzberg méridional et vice versa (Carte de l'île du Spitzberg).
Pourquoi ne retrouve-t-on pas le cinquième gouffre? Le blizzard a accumulé plus de 10 m de neige à l'endroit où se trouvait le cinquième gouffre. De ce fait, le poteau de 3 m de haut installé l'automne précédent n'est plus visible. Munis d'une génératrice permettant de chauffer une pointe de métal, les scientifiques polonais ont fait des sondages dans l'espoir de percer la neige et la glace à l'aplomb de la cavité étudiée précédemment. Les chances de tomber sur la cavité étaient très faibles, car celle-ci est étroite, moins de 2 m de large!
Le haut des moulins tapissé de cristaux de glace Lorsque l'on ouvre un gouffre, à la fin de l'hiver, on découvre toujours dans le haut de celui-ci de grands cristaux de glace provenant de la sublimation de la vapeur d'eau contenue dans l'air. Ces cristaux ont des formes variées qui, cependant, sont analogues à celles des cristaux qui constituent les flocons de neige. Mais au lieu d'être de l'ordre du millimètre, ces cristaux ont des formes jusqu'à 100 fois plus grandes, de l'ordre de la dizaine de centimètres!
Comment les cristaux de glace apparaissent-ils? Dès la mi-septembre en général, le blizzard souffle violemment la neige à la surface du glacier. Les flocons s'agglutinent et forment un tapis qui couvre progressivement les gouffres tel un couvercle sur une casserole! Une fois le gouffre fermé par le couvercle appelé pont de neige, l'air s'y stabilise à la température de la glace et se sature en vapeur d'eau (100 % d'humidité). Cependant la température de la glace n'est pas la même partout de haut en bas du gouffre : quelques mètres sous la surface elle est négative autour de - 10 °C, en profondeur elle est comprise entre - 1 °C et 0 °C! Avec l'arrivée du froid polaire durant l'hiver, la température de la glace du glacier et de l'air des moulins à proximité de la surface continue à s'abaisser, alors qu'en profondeur la température reste stable.
L'air ainsi refroidi est incapable de garder autant de vapeur d'eau, celle-ci se sublime sous forme de cristaux dans le haut du gouffre. De plus, l'air au fond du gouffre, plus chaud, plus léger et saturé en eau, tend à monter, alors que l'air plus froid en haut du gouffre, donc plus dense, tend à descendre. Ce lent brassage amène en permanence en haut du gouffre, sous le pont de neige, de l'air saturé en vapeur d'eau qui, en se refroidissant à son tour, permet la sublimation de la vapeur d'eau sous forme de cristaux de plus en plus grands et imbriqués les uns dans les autres. Ce processus dure jusqu'au printemps. Après quoi les eaux de fonte percolant dans le pont de neige les détruisent avant de rouvrir ce dernier.
Les eaux les plus minéralisées ont la conductivité la plus élevée Les eaux qui sont prisonnières dans le corps du glacier proviennent de la fonte de la neige tombée en hiver et de la fonte de la glace à la surface du glacier. Ces eaux sont donc très peu minéralisées, puisqu'elles ont pour origine première la neige tombée du ciel. . . qui est constituée de cristaux condensant la vapeur d'eau de l'atmosphère. Une fois les eaux de fonte captives des entrailles du glacier, elles se trouvent au contact de parois de glace à une température légèrement inférieure à 0 °C (environ -1 °C). Tant qu'elles sont en mouvement, ces eaux ne gèlent pas. Le froid fourni par les parois de glace n'est pas suffisant. Cependant, lorsque ces eaux cessent d'être alimentées par la fonte en surface, elles s'immobilisent. Alors, ces eaux de fonte prisonnières tendent à regeler lentement…
…On sait que, à ce moment, les rares minéraux dissous accroissent leur quantité dans l'eau résiduelle. Ils sont en quelque sorte exclus du processus de cristallisation produisant la glace. Ce fait est d'autant plus vrai que le regel est lent, situation typique au coeur du glacier. Cela veut dire que l'eau contenant plus de minéraux dissous est celle qui est restée plus longtemps prisonnière du glacier. Or, il est facile de mesurer le niveau de minéralisation de l'eau : on mesure sa résistance au passage d'un courant électrique, c'est-à-dire sa conductivité. Ces mesures permettent de donner un âge relatif aux eaux trouvées dans le glacier. Il va de soi qu'il faut aussi mesurer le niveau de minéralisation des eaux dans les bédières, à leur entrée dans le corps du glacier. Pour prélever un échantillon d'eau, Claude est installé sur un plancher de la glace de plus de 12 cm d'épaisseur. C'est dire que les eaux prisonnières du glacier sont restées à un niveau stable assez longtemps pour qu'un tel plancher de glace soit apparu. Pourtant, au-dessus, on observe de minces niveaux de glace dessinant de nombreux cernes horizontaux sur le pourtour du gouffre. Ces marques attestent que l'eau a monté dans le gouffre, puis que son niveau s'est abaissé par à-coups, chaque moment de stabilité permettant l'apparition d'un nouveau cerne!.
Pourquoi l'exploration des gouffres sera-t-elle interdite dans quelques jours? La fonte de la neige à l'extérieur va bientôt commencer. Durant un certain temps, les eaux de fonte ne feront que percoler dans le tapis neigeux épais de 3 mètres. Ensuite, les eaux se concentreront sous la neige à la surface du glacier en suivant sa topographie. Elles "retrouveront" ainsi les bédières et les moulins où elles s'engouffreront, surcreusant à nouveau les parois du moulin. . .
Bien que se jetant dans la mer, le glacier Hans contient plus d'eau à la fin de l'hiver (en mai) qu'au début (octobre) Ces eaux remplissent d'immenses puits verticaux sans pour autant geler. L'évolution du gouffre Félix est exemplaire à ce point de vue. Découvert en 1988, le gouffre Félix n'a pu être observé que jusqu'à 150 m de profondeur. Aucune trace d'eau n'y est alors aperçue, bien que le gouffre soit nettement plus profond. De 1988 à 1991, la surface du glacier s'est abaissée de un mètre par an à la suite de la fonte de la glace. Le moulin principal du gouffre Félix est inactif, un bouchon de neige durcie l'obstrue. Les bédières qui l'alimentaient se déversent maintenant dans un moulin situé 200 m plus en amont. Cependant, les eaux de fonte à la périphérie immédiate de Félix ont incisé un petit puits qui s'est branché sur le gouffre principal.
Malheureusement, en octobre 1991, l'eau noie ce gouffre jusqu'à 75 m sous la surface. . . Et lorsque nous le visitons à nouveau en mai 1992, on constate que le niveau d'eau s'est stabilisé assez longtemps à 40 m sous la surface pour qu'un plancher de glace de 12 cm d'épaisseur apparaisse. Cependant, sur les parois du gouffre, au-dessus du plancher, nous avons observé de nombreux cernes horizontaux de fine glace (de 0, 5 cm à 3 cm d'épaisseur) qui attestent que le niveau de l'eau durant l'hiver est monté jusqu'à 28 m sous la surface, puis est redescendu par saccades, comme un évier qui se viderait par à-coups! Le niveau de l'eau dans le gouffre Félix varie.
Comment cela se fait-il que le soleil se trouve au nord? D'après le tableau ci-dessous, on constate qu'à la latitude de la base polonaise (77° lat. N), le soleil ne se couche pas du 24 avril au 18 août! De ce fait, il parcourt le ciel d'un mouvement apparent qui lui en fait faire le tour. . . et, par conséquent, il passe aussi par le nord. Pour voir le soleil au nord, il faut donc être au moins à la latitude du cercle polaire. Question pour les observateurs : Combien de temps dure le voyage de retour en motoneige? Réponse : 22 heures non stop. Fatigant donc, mais moins long qu'à l'aller (2 jours) Latitude Soleil de minuit Nuit polaire Nord 12 -04 au 30 -08 = 19 -10 au 21 -02 = 81° 141 jrs 128 jrs 21 -04 au 21 -08 = 25 -10 au 17 -02 = 79° 123 jrs 110 jrs 77° (base 24 -04 au 18 -08 = 31 -10 au 11 -02 = polonaise) 117 jrs 104 jrs 30 -04 au 12 -08 = 06 -11 au 05 -02 = 75° 105 jrs 92 jrs
Est-ce vraiment la fin? Il ne faudrait pas que cela soit la fin. En effet, par le biais de ce documentaire-vidéo, nous avons vécu ensemble une belle aventure qui a permis de découvrir des terres polaires fascinantes sous des aspects inattendus. Dans ce milieu, même le soleil paraît étrange par ses longues absences ou par ses cavalcades au ras des montagnes, éclairant jour après jour et sous tous les angles un monde de glaciers au comportement encore énigmatique. Nous avons aussi essayé d'exercer notre sens de l'observation en pratiquant une géographie amusante. Mais attention, grâce à cette discipline, on perçoit le milieu naturel d'une façon intégrée. Ce point de vue est devenu indispensable pour que l'on soit sensibilisé aux multiples problèmes environnementaux qui affectent la planète Bref, la géographie, cela sert à apprendre plus et mieux. Jacques Schroeder Département de géographie UQAM
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