Paradoxe de Solow au second ge des machines

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Paradoxe de Solow, au second âge des machines ? Mickaël Clévenot CEPN/UBFC 5ème journée

Paradoxe de Solow, au second âge des machines ? Mickaël Clévenot CEPN/UBFC 5ème journée Jinnov 25 juin 2018 1

Le paradoxe actuel : Malgré la présence d’une myriade d’innovations : le second âge

Le paradoxe actuel : Malgré la présence d’une myriade d’innovations : le second âge des machines (Brynjolfson et Mc. Afee [2015]) Faiblesse des gains de productivité dans les pays avancés Résurgence du paradoxe de Solow et retour de l’hypothèse de stagnation séculaire ? (L. Summers [2013], R. Gordon [2012, 2014]) Ce paradoxe est-il amené à se résoudre rapidement ? Est-il lié à un contexte spécifique post-crises Sub-prime, zone euro ? ou correspond-il au contraire à un phénomène plus structurel ? 2

Brynjolfsonne Mc. Afee: le second âge des machines Zetta 3

Brynjolfsonne Mc. Afee: le second âge des machines Zetta 3

Brynjolfsonne Mc. Afee: le second âge des machines Le 2 AM nouveau paradigme productif

Brynjolfsonne Mc. Afee: le second âge des machines Le 2 AM nouveau paradigme productif composé à partir d’une myriade d’innovations numériques. « innovation comme composante […] elle augmente en permanence les possibilités de recombinaisons futures» p. 93 à l’origine de processus exponentiels illustrant la loi de Moore. L’IA et les progrès en robotiques permettent de lutter contre la nouvelle frontière : le paradoxe de Moravec. : « …nous pensons que l’innovation et la productivité vont continuer de croître de façon substantielle » . p. 101 « Le 2 eme âge de la machine […] interconnexion de milliards de cerveaux qui travailleront ensemble pour mieux comprendre et améliorer notre monde. Tout ce qui 4 existait auparavant paraîtra, en comparaison, dérisoire. » p. 111

Brynjolfsonne Mc. Afee: le second âge des machines La limitation des gains de productivité

Brynjolfsonne Mc. Afee: le second âge des machines La limitation des gains de productivité ne serait due qu’à notre incapacité à traiter suffisamment rapidement les idées nouvelles… Ils reconnaissent cependant 2 grands problèmes : 1. la dispersion des revenus : the winner takes all, 2. les innovations mettent la pression à la baisse sur les salaires peu qualifiés et routiniers. « Loin d’être persuadés que l’abondance issue de la technologie compense largement la dispersion qu’elle produit, nous redoutons qu’il se passe précisément le contraire : ie que la dispersion, dans les années qui viennent, réduise fortement l’abondance » . p. 197 Ceci tiendrait essentiellement aux freins politiques suscités par le chômage 5

Que se passe-t-il réellement du point de vue de la productivité ? 6

Que se passe-t-il réellement du point de vue de la productivité ? 6

Productivité par heure travaillée 7 Sources : The Total Economy Database

Productivité par heure travaillée 7 Sources : The Total Economy Database

Productivité par heure travaillée 8 Sources : The Total Economy Database

Productivité par heure travaillée 8 Sources : The Total Economy Database

Productivité par heure travaillée 9 Sources : The Total Economy Database

Productivité par heure travaillée 9 Sources : The Total Economy Database

Quelles autres explications de la faiblesse des gains de productivité ? Celles qui tiennent

Quelles autres explications de la faiblesse des gains de productivité ? Celles qui tiennent à une dimension institutionnelle, pensant que le paradoxe peut être levé avec des modifications sans transformations de l’ordre social. Les explications qui soulignent les conflits de répartition nécessitant une transformation politique. Les explications hybrides mêlant les deux aspects. La stagnation actuelle des gains de productivité pourrait correspondre à une conjonction de facteurs. Globalement cela tient à la crise de la seconde mondialisation… 10

La stagnation chez Cette : phénomène d’adaptation Plus on investit dans les TIC meilleurs

La stagnation chez Cette : phénomène d’adaptation Plus on investit dans les TIC meilleurs sont les gains de productivité. La première vague des TIC entre 1995 et 2000 ne constituerait que la première phase de croissance des gains de productivité. Les gains attendus du second âge des machines seraient beaucoup plus importants Mais il y des délais dans l’apparition des gains de productivité David [1994]. Des blocages liés à la formation. On évoque également les problèmes liés à la mesure du PIB (H. Varian) 11

Explications du paradoxe : Zingales [2018] La finance n’apparaîtrait pas directement en cause (pas

Explications du paradoxe : Zingales [2018] La finance n’apparaîtrait pas directement en cause (pas de rente) Mais plus indirectement, les M&A, la concentration et la réduction de la concurrence produiraient une réduction de l’investissement et des salaires sans effet sur la productivité. Cela conduirait également à une réduction de l’investissement, une augmentation des prix et des profits. Les crédits sont trop affectés à des dépenses improductives (investissement immobiliers, consommation) et pas suffisamment à l’investissement productif. En Europe, l’euro a conduit à de mauvaises affectations des investissements et la crise a durablement pénalisé l’investissement et la croissance. Solutions : lutter contre les trusts, changer la gouvernance des entreprises, soutenir le crédit aux entreprises innovantes, réformer la zone euro, réformer la propriété sur les données. 12

L’économie zombie : Andrews, D et alii (2017) Depuis la crise, les auteurs observent

L’économie zombie : Andrews, D et alii (2017) Depuis la crise, les auteurs observent une faiblesse de la productivité ainsi qu’une augmentation de sa dispersion entre les entreprises. Une réduction de l’efficacité de la réallocation des capitaux et des mouvements d’entrée et de sortie Les entreprises les moins performantes peuvent se maintenir sur le marché en raison de conditions de financement très/trop accommodantes. Le mécanisme de destruction/créatrice est freiné ce qui limite les gains de productivité. Dans un contexte concurrentiel et de politique économique normale, les entreprises zombies devraient disparaître… Mais elles survivent réduisant d’autant la productivité moyenne. 13

L’économie zombie : Andrews, D et alii (2017) Cela freine ou empêche l’entrée d’entreprises

L’économie zombie : Andrews, D et alii (2017) Cela freine ou empêche l’entrée d’entreprises plus jeunes et/ou le développement des plus performantes => congestionne l’économie. Il faudrait rapidement sortir les zombies en adaptant les règles d’insolvabilité et réduire les barrières à la sortie liée aux coûts individuels et collectifs. Favoriser la mobilité du travail en réduisant les coûts de transaction sur le logement. Favoriser les politiques « actives » formation, accompagnement des chômeurs au détriment des politiques « passives » , des indemnités longues. Restructurer rapidement celles qui peuvent l’être et favoriser la diffusion des innovations de manière à réduire la dispersion de la productivité. La présence de zombies serait liée à des banques peu performantes et à des 14

La stagnation séculaire vue comme la crise du régime de croissance financiarisé (Aglietta [2015])

La stagnation séculaire vue comme la crise du régime de croissance financiarisé (Aglietta [2015]) Les exigences de rentabilité imposées par la finance limitent les investissement productifs. Cela déprimerait la demande globale, les salaires et conduirait à un cercle autoentretenu de déflation limitant les gains de productivité et favorisant la stagnation. De plus, cette faiblesse de l’investissement ne favorise pas la transition écologique qui appelle au contraire un renouvellement important du stock de capital. La transition écologique pourrait donner lieu à la formation d’un nouveau régime de croissance tiré par des investissements moins énergivores, plus « verts » . Une nouvelle révolution industrielle favorable à l’emploi (le double dividende) 15

Gordon et les innovations prométhéennes Les innovations dans le sillage de l’Internet ne seraient

Gordon et les innovations prométhéennes Les innovations dans le sillage de l’Internet ne seraient pas aussi fondamentales que celles qui ont produit la vague de productivité du milieu du XX. Les innovations prométhéennes (le feu, domestication, la culture, l’élevage, la religion, la vapeur, le pétrole et l’électricité). Sans nouvelle innovation prométhéenne, la stagnation devrait se poursuivre d’autant que 7 vents contraires viennent s’ajouter. 1. 2. 3. 4. 5. Vieillissement de la population Stagnation du niveau d’éducation Montée des inégalités Mondialisation Coût de l’énergie 6. Problème du réchauffement climatique 7. Endettement des ménages et de l’Etat 16

La stagnation chez Artus et Virard [2015] Les innovations auraient des rendements décroissants. La

La stagnation chez Artus et Virard [2015] Les innovations auraient des rendements décroissants. La mise en œuvre de nouveaux médicaments seraient de + en + compliquée et couteuse. La recherche d’énergie idem, forage en eau profonde, pétrole bitumineux. Au niveau mondial, les inégalités de répartition salaires/profits sont peu favorables à la croissance de la demande (mais pas en France). Les économies se tertiarisent réduisant structurellement les gains de productivité. Sans pouvoir lutter contre ce mouvement de fond, les auteurs proposent des 17 solutions de chocs pour éviter que la stagnation des revenus ne se transforme en

La stagnation chez Artus et Virard [2015] Pour restaurer la compétitivité française on devrait

La stagnation chez Artus et Virard [2015] Pour restaurer la compétitivité française on devrait abaisser le SMIC à 50 % du salaire médian contre 70 % actuellement. En contrepartie une élévation des prestations sociales soumises aux conditions de revenus. Globalement, les salaires devraient suivirent les gains de productivité sans les dépasser. Il faudrait réduire la séparation insiders-outsiders, contrat unique. Réduire les dépenses de l’Etat, stabiliser les dépenses au titre des retraites. Ces réformes très dures risquent d’entraîner de fortes résistances. Elles doivent impérativement être réalisées en ayant à l’esprit l’équité dans les 18

La controverse Ricardo/Malthus sur la stagnation Ricardo s’appuie sur la loi des rendements décroissants.

La controverse Ricardo/Malthus sur la stagnation Ricardo s’appuie sur la loi des rendements décroissants. La croissance conduit à l’emploi de toujours plus de salariés ce qui implique une élévation du salaire de subsistance. La part des salaires et de la rente foncière augmente réduisant ainsi la part des profits. L’affaiblissement des taux profit détruit le motif d’accumulation, l’économie tend vers la stagnation. Solutions transitoires : le progrès technique s’il permet d’économiser le travail ou que le commerce international autorise une réduction des coûts d’entretien de la force de travail … La stagnation pourrait être repoussée aussi longtemps que les profits seront 19

L’inadéquation de l’offre chez Malthus observant des progrès rapides dans l’industrie et l’agriculture, il

L’inadéquation de l’offre chez Malthus observant des progrès rapides dans l’industrie et l’agriculture, il abandonne l’hypothèse des rendements décroissants. Néanmoins, Malthus pense que la stagnation pourrait survenir en raison d’une faiblesse de la demande effective. Le progrès technique permet d’élever la productivité physique mais l’élévation de la production si elle fait face à une stabilisation voire une baisse de la demande va connaître une baisse de sa valeur, donc une baisse de la productivité en valeur. Pour lutter contre la chute des profits, les entreprises se lanceraient dans une course à l’investissement et aux innovations mais cela produirait l’effet inverse, suraccumulation. La réduction de la masse salariale concomitante à la élévation de l’offre conduit 20 inévitablement à la crise et à la stagnation.

Re-contextualisation et tentative de synthèse : Depuis la fin des années 1970, l’économie mondiale

Re-contextualisation et tentative de synthèse : Depuis la fin des années 1970, l’économie mondiale a été affectée par d’importants chocs d’offres négatifs conduisant à une élévation de l’inflation. Pour y faire face, des politiques d’offre se sont progressivement généralisées. L’objectif initial visait à lutter contre l’inflation et rétablir les profits. A partir de la seconde moitié des années 1980, contre-choc pétrolier puis entrée des pays émergents et apparition des TIC. Ces chocs d’offre positifs ont eu tendance à produire des effets déflationnistes. La mauvaise gestion de la crise de 1997 par le FMI et la Banque mondiale ont renforcé cela. 21

Contexte et tentative de synthèses : L’arrivée des pays émergents a renforcé la concurrence

Contexte et tentative de synthèses : L’arrivée des pays émergents a renforcé la concurrence vis-à-vis des pays avancés et a augmenté les inégalités. Cette tendance a été renforcée par la finance, mais la puissance motrice fondamentale se trouve dans le progrès technique. Le progrès technique, la mondialisation et la financiarisation se conjuguent pour renforcer les inégalités et détruire des emplois de faible qualification, puis intermédiaire, puis élevée. Au niveau mondial, les salaires croissent moins rapidement que les gains de productivité. La demande globale ne peut être en adéquation avec l’offre globale que par une dérive de l’endettement (régime de bulles). Sauf à imaginer que les vainqueurs de la mondialisation réalisent énormément de dépenses improductives. Dans cette configuration, ce sont les inégalités sociales qui seraient alors à l’origine de tensions politiques. 22

Comme à la fin du XIX et au 1 er tiers du XX, le

Comme à la fin du XIX et au 1 er tiers du XX, le blocage n’est pas tant du côté de l’offre que de la demande. Mais la mondialisation inhibe la demande en raison des effets sur l’équilibre externe ce qui produit une tendance déflationniste. Le besoin de mettre en place des instruments de coordination de la demande globale dans une économie fortement intégrée devient de plus en plus crucial pour éviter les replis nationalistes. Au-delà, la question sociale des effets du winner takes all et celles des inégalités technologiques devraient être intégrées dans une réforme ambitieuse de la protection sociale (revenu universel et/ou emploi garanti). Financé à travers une fiscalité renouvelée qui permettrait de corriger les effets du winner takes all(remontée de la progressivité). Taxe sur le chiffre d’affaires, lutte contre l’évasion fiscale et les paradis fiscaux. 23

Avec l’arrivée à maturité des grands émergents, la déflation par la mondialisation devrait réduire

Avec l’arrivée à maturité des grands émergents, la déflation par la mondialisation devrait réduire ses effets. Mais la question des inégalités technologiques rendue plus aigüe par la logique financière risque de se renforcer avec le 2 AM. La stagnation contemporaine possède à la fois des facteurs exogènes ( écologie, baisse du rendement de certaines innovations) Ceci pourrait être contrebalancé » par le 2 AM ? et endogènes (inégalité/fiscalité/finance) Le 2 AM, comme le fordisme devra établir des institutions « inclusives » pour produire une élévation durable des gains de productivité. 24

Merci de votre attention. 25

Merci de votre attention. 25