Management des ressources technologiques et des NTIC MSM

Management des ressources technologiques et des NTIC MSM 1ère année – 2008/2009 Cours de P. Corbel Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines Chapitre 2 : Créer et acquérir de nouvelles technologies (et de nouveaux concepts)

Plan w Les sources d’innovation et de technologies n n n Les sources internes à l’organisation Les sources externes d’idées Les sources externes de technologies w Les structures favorables à l’innovation n n Les structures « organiques » et leurs difficultés Combiner structures organiques et formalisme w Le déroulement des projets d’innovation n n Le problème de la sélection L’organisation des projets

Les sources internes w L’innovation peut avoir pour origine principale les services spécialement dédiés w Le premier d’entre eux est le département de R&D (ou les bureaux d’études) n Ils proposent de nouvelles technologies qui peuvent l l n soit être associées à un produit précis (lien molécule-médicament dans l’industrie pharmaceutique) soit être relativement indépendantes (donc potentiellement utilisables dans plusieurs produits) Les services de R&D posent des problèmes de management spécifique

Problèmes spécifiques de management w Les résultats sont difficiles à mesurer (brevets ? évaluation par les pairs ? nouveaux produits ? …) w Le problème des relations avec les autres services n n n Risque de déconnexion (ex. Xerox Parc) Pour l’éviter : fort contrôle managérial, rotation des postes, introduction de mécanismes de marché… Mais si trop intégrés : manque de recul et de créativité w Le dilemme centralisation/décentralisation n n D’un côté, meilleure coordination, taille critique, pas de doublons De l’autre, plus en prise avec les problèmes opérationnels

Les autres services dédiés n Les services d’ingénierie de la production l n Les services de qualité l n Peuvent être à l’origine de nouveaux concepts Les services informatiques l n Peuvent amener des innovations de produit, de procédé, mais aussi organisationnelles Les services marketing l n Qui ont pour mission de concevoir et de transformer les processus de fabrication (innovations de procédé) Qui peuvent être instigateurs d’améliorations du système d’information Mais chaque service peut être à l’origine d’innovations dans son domaine

Faire émerger les idées w On constate que tout salarié est susceptible de générer des idées d’innovations n n On peut parfois augmenter le potentiel de créativité de ses salariés par exemple en utilisant des outils de créativité Une des difficultés est d’inciter les salariés à faire connaître leurs idées l l n Processus formels ( « boîtes à idées » , concours…) Climat général et structure (partie II) … puis d’assurer la sélection et la coordination des projets (partie III)

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Les sources externes d’idées w Les clients sont probablement les principales sources d’idées nouvelles n n Soit directement (réponse à une demande précise – ex. banque d’affaires) Soit indirectement à travers ses remarques ou son comportement w Mais les fournisseurs sont également des sources importantes d’idées innovantes : n n De procédé (fournisseurs d’équipements…) De produit (fournisseurs de composants et de sousensembles… ex. nouvel arôme)

Les sources externes d’idées (2) w Les concurrents sont également des sources indirectes d’innovation : n n Par exemple, le lancement d’une nouvelle technologie brevetée par un concurrent peut inciter à recher des moyens de la contourner D’une manière générale, la pression concurrentielle est source d’innovation (ex. Swatch) w Globalement, toutes les « parties prenantes » (stakeholders) de l’entreprise sont sources potentielles d’innovation, par exemple : n n Les pouvoirs publics (réglementation – ex. des allergènes en parfumerie) Les mouvements consuméristes ou écologistes, etc.

Intégrer les sources externes w Les sources externes ont toutefois besoin de relais à l’intérieur de l’entreprise w Tous les services peuvent être amenés à jouer un rôle à ce niveau w Deux types de services ont toutefois pour rôle principal de servir ainsi de relais : n n Les services de marketing qui analysent les besoins des clients et consommateurs La cellule de veille technologique qui fait remonter les informations sur les avancées scientifiques et technologiques récentes et les mouvements des concurrents

La veille technologique w Les cellules de veille technologique sont plus ou moins formalisées w Elles sont typiquement composées de scientifiques et d’ingénieurs w Leurs moyens d’investigation sont principalement: n n n Les revues techniques et scientifiques Les bases de brevets Les conférences et colloques (associations scientifiques et professionnelles) w Là encore, la difficulté est de sélectionner les informations pertinentes et de les faire circuler

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Syndrome NIH ? w Certaines entreprises ont une culture de développement interne w L’invention de nouvelles technologies est en règle générale plus valorisée que l’utilisation ou l’imitation des technologies des concurrents w Pourtant certaines entreprises obtiennent des succès non négligeables avec ce type de stratégie (ex. Matsushita) w Par ailleurs, aucune entreprise ne peut prétendre pouvoir développer l’ensemble des technologies nécessaires à son activité w Il faut donc savoir surmonter le syndrome « Not Invented Here »

Des compétences proches de celle de l’innovateur w L’imitation ou l’acquisition de technologies à l’extérieur seront plus efficaces si l’entreprise détient des ressources proches de celles d’un innovateur : n n Des compétences techniques facilitant l’appropriation des technologies (ex. informatique) – Cohen et Levinthal parlent de « capacités d’absorption » Un portefeuille de technologies intéressantes (permet des échanges de technologies + compétences liées à la gestion de ce portefeuille : ex. brevets)…

Imitation et avantage concurrentiel w Qu’il s’agisse à proprement parler d’imitation ou d’acquisition de technologies « sur l’étagère » , l’entreprise ne peut profiter des avantages du pionnier w En terme de temps, elle peut se procurer un avantage : n n En faisant partie des premiers suiveurs En étant la première à appliquer une technologie ou une méthode utilisée dans un autre secteur w Mais s’agissant de technologies disponibles pour d’autres, un avantage concurrentiel durable ne peut provenir que d’une meilleure utilisation de celles-ci

Les équipements, première source externe de technologies w Tous les équipements de production au sens large incorporent des technologies plus ou moins complexes w L’acquisition de ces équipements revient donc à acquérir le droit d’utiliser ces technologies w Lorsque les technologies en question prennent une forme immatérielle, un contrat de licence est d’ailleurs signé w Lorsqu’elles sont complexes, elles sont associées à des actions d’accompagnement assurées par le fournisseur (formation, encadrement de la mise en œuvre…) w Il s’agit donc du moyen le plus simple d’acquérir des technologies développées à l’extérieur

Avantages et limites w L’acquisition des équipements et logiciels à l’extérieur procure des avantages importants en matière de coûts w Le fournisseur est un spécialiste de son domaine et peut donc développer des compétences d’autant plus pointues w L’acheteur peut ainsi concentrer ses efforts sur ses propres compétences clés w En revanche, le développement interne permet de développer des produits sur-mesure : n n Mieux adaptés aux spécificités de l’entreprise Qui peuvent être sources de différenciation

Une deuxième source : la rétroingénierie w Il s’agit, par décomposition d’un produit, de reconstituer son fonctionnement w Les produits mécaniques sont démontés et le fonctionnement de chacun des sous-systèmes qui le composent est analysé w Dans le cas de logiciels ou de sous-systèmes nondémontables (ex. une puce électronique), les ingénieurs relèvent systématiquement les entrées et les sorties et recomposent ainsi leur fonctionnement interne w Pour les produits chimiques, il existe des techniques spécifiques d’analyse (ex. spectrométrie, chromatographie)

Difficultés de mise en oeuvre w En règle générale, le problème principal n’est pas technique, mais est lié aux droits de la propriété intellectuelle w Les technologies reconstituées peuvent être protégées par un ou plusieurs brevets ou par des copyrights w Exemple : le BIOS de l’IBM PC

La sous-traitance de la R&D w Il est possible de sous-traiter la R&D d’une technologie ou d’un produit : n n n Auprès de sociétés spécialisées Auprès de laboratoires universitaires (recherches plus en amont ou tests) Parfois auprès de laboratoires de groupes industriels w La sous-traitance peut être totale ou partielle (ex. mise à disposition d’ingénieurs venant s’intégrer au projet interne) w La difficulté est alors la gestion des aléas du développement (délais, budget)

L’achat de technologies w Le plus souvent les technologies sont matérialisées par un ou plusieurs brevets w L’acquisition de la technologie passe alors par l’achat du ou des brevets ou, plus souvent, par l’acquisition d’une licence [droit d’utilisation] w Mais si l’utilisation de la technologie est complexe, un contrat de « transfert de technologie » peut prévoir : n n n Des sessions de formation La mise en œuvre effective de la technologie sous la responsabilité du vendeur Le détachement d’ingénieurs de l’entreprise vendeuse…

L’échange de technologies w Le principe est le même w La contrepartie n’est simplement pas (seulement) monétaire w Dans certains secteurs (ex. électronique), ces accords sont toutefois à la fois : n n Très courants Souvent globaux (ex. accord Sony-Samsung en 2004) w Ils permettent de gérer les problèmes d’interdépendance entre technologies

L’acquisition d’entreprises w Dans certains cas, les groupes d’une certaine taille n’hésitent pas à procéder à l’achat d’entreprises pour accéder à leurs technologies w Outre les difficultés habituelles liées aux acquisitions d’entreprises, viennent s’ajouter : n n La volatilité supérieure de la valeur de ces entreprises Les difficultés d’intégration (contraste des structures, risque de départ des « cerveaux » ) w Quelques entreprises comme Cisco sont devenues des spécialistes de l’intégration de start-up (plus de 120 entreprises achetées)

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Structure mécaniste vs organique w D’après Burns et Stalker : n n Organisation mécaniste (bureaucratique) : bien adaptée à un environnement stable et prévisible Organisation organique : plus adaptée à l’innovation… w Cette dernière permet en effet : n n n De multiplier les interactions (concept de « friction créative » de Leonard et Straus) D’élargir le champ des possibles (définition plus vague des rôles) De modifier plus facilement les structures pour les adapter aux projets en cours

Les limites des structures organiques w Elles posent des problèmes de coordination lorsque la taille de l’organisation s’accroît n D’où la crise de croissance que vivent certaines start-up innovantes w Les projets d’innovation eux-mêmes nécessitent un minimum de formalisme dans leur gestion n D’où les multiples outils de gestion de projet (ex. PERT) w Enfin ce type de structure ne facilite pas la capitalisation des savoirs n Sauf à multiplier les passerelles entre les projets

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Vers des structures mécanistes et organiques ? w Les entreprises d’une certaine taille ont besoin d’une certaine dose de bureaucratie pour fonctionner w Mais il faut laisser des « espaces d’innovation » w Lawrence et Lorsch avaient souligné dès les années 1960 que les services d’une entreprise pouvaient rencontrer des environnements différents et donc nécessiter des structures différentes w Mais cela pose alors des problèmes d’intégration (ex. des services de R&D très autonomes)

Plus concrètement w Plusieurs solutions concrètes permettent de « doser » entre structures organiques et bureaucratiques : n n n La formation de groupes de projet (structures organiques) à l’intérieur de structures bureaucratiques Les structures matricielles avec une dimension « projet » Les systèmes d’essaimage et d’intrapreneurship… w Le point commun est une forme de superposition entre deux ou plusieurs structures w Que l’on retrouve aussi chez Nonaka et Takeuchi…

La structure hypertexte w Nonaka et Takeuchi proposent de superposer trois niveaux : n n n Un niveau groupes de projets Un niveau système d’entreprise Un niveau « base de connaissances communes » destiné à cimenter les deux autres Nonaka et Takeuchi (1997, p. 191)

La structure hypertexte (schéma)

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L’entonnoir w Les projets d’innovation sont potentiellement extrêmement nombreux w Les ressources que l’entreprise peut débloquer pour les mener à bien sont limitées w Il y a donc un processus de sélection w Cette sélection se déroule généralement progressivement : n n n Certains projets présentés sont refusés aussitôt D’autres vont faire l’objet de pré-études techniques, commerciales et/ou financières Une nouvelle sélection a lieu alors…

La sélection w Dans les entreprises d’une certaine taille, ce sont généralement des comités ad-hoc qui sont chargés de cette sélection w Les principaux critères sont : n n Les bénéfices potentiels que l’on peut tirer de l’innovation Son coût prévisionnel Les risques associés Son adéquation avec la stratégie de l’entreprise w La liste de ces critères montre qu’il s’agit d’un exercice délicat

Les difficultés de la sélection w Reprenons en effet ces derniers : n n n Les bénéfices sont très difficiles à évaluer (manque de fiabilité des études de marché, méconnaissance des projets de la concurrence, etc. ) Les coûts sont difficiles à prévoir (problèmes techniques imprévus à résoudre, AMM, etc. ) Un projet d’innovation peut être évalué au regard de la stratégie actuelle de l’entreprise… mais celle-ci peut changer w Certaines entreprises tentent donc conserver une certaine souplesse grâce à des investissements partiels et/ou l’externalisation partielle du projet (coopération, essaimage…)

Plan w Les sources d’innovation et de technologies n n n Les sources internes à l’organisation Les sources externes d’idées Les sources externes de technologies w Les structures favorables à l’innovation n n Les structures « organiques » et leurs difficultés Combiner structures organiques et formalisme w Le déroulement des projets d’innovation n n Le problème de la sélection L’organisation des projets

Les groupes de projet w Principes essentiels : n Il s’agit de groupes constitués pour mener un projet précis l n Ils sont constitués autour d’un responsable (ou d’un groupe de responsables) de projet l n Ils sont donc dissous une fois le projet terminé Évite la dilution des responsabilités entre les services Ils sont à géométrie variable l l l Permet d’ajuster les ressources allouées au projet en fonction de son avancement Permet la mise en œuvre des méthodes d’ingénierie concourante Facilite le dialogue entre individus aux profils différents (donc la « friction créative » )

Application aux projets d’innovation w Leur utilisation est maintenant généralisée, mais avec des variantes : n n n L’ampleur des projets et leur nature (produit, procédé, organisation) conditionne le nombre de services impliqués Les participants peuvent être complètement détachés ou non (un même groupe pouvant comporter les deux types de participants), pour des durées plus ou moins longues Le profil des responsables est très variable (plutôt technique, plutôt marketing, plutôt « manager » ) mais ils doivent pouvoir dialoguer avec l’ensemble des participants

Les étapes d’un projet w Elles divergent considérablement en fonction de la nature du projet et de l’industrie w Certaines innovations incrémentales peuvent être mises en œuvre très rapidement w D’autres projets passent par de multiples étapes d’études – validation – sélection w Le cycle complet peut donc s’étaler de quelques semaines à 10 ou 15 ans…

Le cas de la pharmacie Recherche de nouvelles molécules « Screening » Etudes pré-cliniques Etudes cliniques Autorisation de mise sur le marché

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