Day Crations rflexives 2017 Une uvre dart existe

Day Créations réflexives 2017

«Une œuvre d’art existe en tant que telle à partir du moment où elle est regardée» , selon l’historien de l’art et auteur grec Nicos Hadjinicolaou. Si poser son regard sur un tableau ou une sculpture prouve son existence, sa qualification d’ «œuvre d’art » peut néanmoins susciter du scepticisme chez les profanes de l’art, notamment lorsqu’il s’agit de l’art contemporain et plus encore lorsque la valeur monétaire attribuée à une œuvre nous semble dépasser toute rationalité. C’est l’expérience que j’ai vécue en visitant le Musée Granet, à Aix-en-Provence, à l’automne 2015, devant trois tableaux du peintre américain Cy Twombly. Ces tableaux sont tellement «déstabilisants» (c’est le seul qualificatif qui me vient à l’esprit) que je n’ai pu faire autrement que les photographier, mais sans trop savoir l’usage que je pourrais faire de pareils clichés – que j’ai finalement décidé de classer. Depuis, je n’avais pas cherché à en connaître davantage sur cet artiste. Or, voilà que Paris Match, dans son édition de fin décembre 2016, lui a consacré deux pages à l’occasion d’une rétrospective de son œuvre au Centre Pompidou. C’est à ce moment que je me suis souvenu de mes trois photos… J’ai beau lire que cet artiste est un «peintre rare» , un «alchimiste de l’art» , «un des artistes géants de la seconde moitié du XX e siècle» , un «artiste star de la peinture américaine» , que ses toiles «se présentent comme des poèmes en fusion» , que «chacun de ses tableaux dégage une énergie surpuissante » , je n’arrive pas à vibrer en les regardant ni même à souhaiter exposer une de ses œuvres dans mon salon. Élisabeth Couturier rappelle qu’on a souvent parlé de «dessins d’enfants» à propos des toiles de Twombly et elle utilise d’ailleurs – à juste titre, me semble-t-il – le terme «gribouillages» . Or, de tels gribouillages valent une fortune! En mai 2016, une peinture a été vendue 36, 7 millions $ chez Sotheby’s. Le marché de l’art, particulièrement de l’art contemporain, est nébuleux. Lorsque vient le temps d’établir la valeur commerciale d’une œuvre, il est difficile de tracer la ligne entre la reconnaissance d’un véritable chef-d'œuvre et la pédanterie qui anime les critiques d’art, les galeristes et les acquéreurs millionnaires.

Le Musée Granet, situé sur la Place Saint-Jean-de-Malte, à Aix-en-Provence

Cy Twombly (1928 -2011) De l’art ? Du grand art ? Vraiment ?

Cy Twombly, Américain, 1928 -2011 Untitled, 1968 Peinture glycérophtalique, crayon gras et graphite sur toile. Photographie : R. Day, Musée Granet (6 octobre 2015)

À la fin des années soixante, Twombly a produit une série de tableaux de cette apparence, c’est-à-dire des gribouillages circulaires tantôt blancs, tantôt noirs, sur un tableau gris. Celui-ci, Untitled, 1967 , s’est vendu 15, 2 millions $ chez Christie’s New York en 2011.

Quant à ce tableau, dont on ne voit qu’une partie, il a été adjugé pour 70, 5 millions $ lors d’une vente aux enchères d'art contemporain chez Sotheby's, en novembre 2015. Il s’agissait d’un record pour cet artiste. Le commissaire priseur Oliver Barker a expliqué ce prix de vente par le fait que la série «Tableaux» était largement vue comme l'une de ses plus réussies. «Les gens ressentent une grande affinité avec ces œuvres» , a-t-il déclaré après la

Cy Twombly, Américain, 1928 -2011 Untitled, Mainomenos, Bacchus, 2004 Acrylique et crayon de cire sur panneau de bois. Photographie : R. Day, Musée Granet (6 octobre 2015)

«Et combien de fois a-t-il entendu parler de dessins d’enfants à propos des tourbillons vertigineux et des lignes griffonnées sur ses surfaces presque abstraites […] Cy Twombly […] avait fait le choix de cher d’emblée à retrouver les conditions de cette créativité pulsionnelle, tout en revisitant les mythes fondateurs qui nous constituent. » Élisabeth Couturier Paris Match Comprenne qui pourra. . . Untitled, Mainomenos, Bacchus, 2004 Gros plan Photographie : R. Day, Musée Granet (6 octobre 2015)

Cy Twombly, Américain, 1928 -2011 Second Voyage to Italy (Second Version), 1962 Huile, crayon et graphite sur toile de lin Photographie : R. Day, Musée Granet (6 octobre 2015)

Les tableaux figurant dans les prochaines diapositives proviennent du magazine Paris Match

Cy Twombly, Américain, 1928 -2011 Untitled, Bacchus, 2005 Paris Match (22 -28 décembre 2016)

«Sous les couches et sous-couches de matières lissées, les repentirs et les effacements, se joue un combat entre pulsions archaïques, sensualité sauvage et culture savante. On y repère des références à la mythologie antique, aux poètes romantiques, à la peinture classique ou à l’actualité. La force de l’écriture automatique, l’amplitude gestuelle de l’expressionnisme abstrait et la liberté des graffitis primitifs électrisent les surfaces, “chargées” comme des totems. Faut-il y voir la transcription de la lutte entre passion et raison? La mise en tension de la tragédie grecque? » Élisabeth Couturier Paris Match Comprenne qui pourra… Cy Twombly, Américain, 1928 -2011 Lemons, Photographie, 1998 Paris Match (22 -28 décembre 2016)

Cy Twombly, Américain, 1928 -2011 Blooming, 2001 -2008 Paris Match (22 -28 décembre 2016) «Peintre rare, Twombly doit beaucoup de sa notoriété à la rigueur de son travail, comme le montrent ses immenses toiles pleines de fleurs réalisées entre 2001 et 2008. Vivant sur les bords de la Méditerranée et faisant sienne la culture gréco-latine, il avait pris le chemin inverse de ses compagnons de route quand l’art américain triomphait. Bien que digne héritier des maîtres de l’abstraction lyrique – Jackson Pollock, Mark Rithko, Barnett Newman, Robert Motherwell… – il a créé une écriture singulière en réalisant un pont entre l’Ancien et le Nouveau Monde. » Élisabeth Couturier

Cy Twombly, Américain, 1928 -2011 Untitled, (Grottaferrata), 1957 Paris Match (22 -28 décembre 2016)

Cy Twombly, Américain, 1928 -2011 Coronation of Sesostris, 2000 Paris Match (22 -28 décembre 2016)

Parmi d’autres créations de Cy Twombly, signalons : Le rideau de scène de l’Opéra Bastille, à Paris, réalisé en 1986

Parmi d’autres créations de Cy Twombly, signalons : Le plafond bleu de la salle des bronzes grecs du Louvre, réalisé en 2010

Le critique d’art Charlie Finch, auteur de l’ouvrage Most Art Sucks : Five Years of Coagula, n’était pas impressionné par les créations de Cy Twombly. À la mort de l’artiste, il rappelait que pendant des années les critiques ne s’étaient pas privés pour juger sévèrement ses gribouillages. Selon Finch, les «Tableaux» de Twombly s’apparentent à de simples lignes ondulées qu’un chat aurait tracées avec ses griffes sur un tableau noir.

Documentation • Élisabeth Couturier, «Cy Twombly – L’art en fusion» , Paris Match, 22 -28 décembre 2016. • Site europe 1. fr/ • Charlie Finch, «Was Twombly a fraud? » , site www. artnet. com Illustrations • R. Day (pour les diapositives 5, 8, 9 et 10). • Paris Match (pour les diapositives 12, 13, 14, 15 et 16). • Internet (pour les diapositives 3, 4, 6, 7, 17 et 18). Musique Claude Debussy, «Prélude – Livre 1 – La fille aux cheveux de lin» CD «Musique française pour harpe et cordes» Conception R. Day Janvier 2017 Mes diaporamas sont hébergés sur le site : http: //www. imagileonation. com