Culture de lentreprise Slim Kamoun 2014 Slim Kamoun

  • Slides: 10
Download presentation
Culture de l’entreprise Slim Kamoun, 2014 © Slim Kamoun, 2014

Culture de l’entreprise Slim Kamoun, 2014 © Slim Kamoun, 2014

Chapitre 6 : La culture d’entreprise un déterminant des décisions stratégiques La culture d’entreprise

Chapitre 6 : La culture d’entreprise un déterminant des décisions stratégiques La culture d’entreprise permet une approche spécifique de chaque firme, ce qui constitue une des conditions de l’efficacité de l’analyse et de l’influence aux décisions stratégique. Elle rencontre, dans son application, de nombreux obstacles souvent liés à l’évolution de notre environnement économique et international. Nous nous proposons d’éclairer les principaux mécanismes qui assurent l’influence de la culture dans les décisions stratégiques : • comment la rationalité est toujours limitée et altérée ; • l’effet trompeur de la collégialité ; • la culture, antidote de l’incertitude ; Puis on verra comment les dirigeants, qui n’ont pas nécessairement baigné de longue date dans la culture de l’entreprise, sont amenés cependant à s’y conformer – au moins pour partie. © Slim Kamoun, 2014

 I - Comment la culture influence les décisions stratégiques 1) Une rationalité… limitée

I - Comment la culture influence les décisions stratégiques 1) Une rationalité… limitée De nombreuses études sur la prise de décision ont montré comment, deux matières très contrastées dans leur nature et leur texture, étaient en réalité finement tissées ensemble : • les processus rationnels, soigneusement construits et outillés pour maîtriser la complexité des choses, mais aussi pour encadrer la subjectivité, l’instabilité et la vulnérabilité aux émotions qui caractérisent l’intelligence humaine. Processus soigneusement structurés en phases successives, avec ce qu’il faut de quantification pour être le plus pertinents et – pour mieux contenir le retentissement affectif des enjeux – le plus froidement objectifs possible ; • les enjeux subjectifs, avec leurs préférences et leurs craintes, ou simplement les représentations simplifiées du monde et des mécanismes de la vie que l’on s’est forgées par l’expérience : des influences d’autant plus importantes qu’elles sont largement enfouies dans l’implicite et le subconscient. Autant de biais dans la recherche et la sélection des sources et des informations; puis dans le chaînage des causes et des conséquences, et dans les anticipations du jeu des autres acteurs sur l’échiquier du marché.

2) La collégialité ne réduit pas la subjectivité il a été démontré que le

2) La collégialité ne réduit pas la subjectivité il a été démontré que le caractère collégial de la prise de décision la rend aussi – sinon plus – vulnérable aux biais de points de vue, voire à des effets irrationnels, que la décision individuelle. Exemple : la décision prise par J. F. Kennedy et son cabinet de lancer l’opération de débarquement des troupes US à Cuba en 1962 qui se solda par un échec historique. Les témoignages des acteurs de la décision ont révélé qu’individuellement ils auraient dû s’opposer à l’opération en raison d’objections individuelles majeures, mais que la dynamique collégiale avait conduit à n’en formuler aucune. 3) La réduction de l’incertitude Les faits démontrent que ce type de phénomène est d’autant plus marqué que la décision à prendre a un caractère plus vital ! On peut le comprendre si l’on considère la difficulté humaine de prendre des décisions à forts enjeux, dont les conséquences seront importantes et durables. Aussi bien collectivement qu’individuellement, la conscience de l’importance et du risque stimule le besoin des acteurs de se rassurer, et pour cela de s’appuyer sur une structuration préétablie. Ils le font en réunissant les données et les processus d’élaboration les plus rationnels disponibles, mais aussi très instinctivement en se basant sur des schémas de pensée et des modèles de solutions existants et partageables.

Or dans une entreprise, c’est la culture, qui est par excellence le fournisseur et

Or dans une entreprise, c’est la culture, qui est par excellence le fournisseur et le conservatoire des schémas et modèles. Y compris ceux du fondateur, ou ceux qui ont été consacrés par l’expérience, qui ont pu soutenir les hauts faits et les enjeux gagnés de l’entreprise. Elle fournit les évidences, les valeurs, des schémas de pensée et d’action, et leurs combinaisons. Elle donne également, ce qui n’est pas négligeable pour un décideur, la présomption instinctive que « les troupes suivront » , puisqu’il s’agira pour elles de rejouer un modèle d’action déjà connu et mis en œuvre. Exemples: Chez Atos Origin, c’est par la croissance externe qu’on grandit. Pour les laboratoires Roche, si la qualité de la recherche est conforme aux standards d’excellence de la maison, le produit ne peut que s’imposer quelles que soient les positions des concurrents. Tandis qu’Auchan se développe essentiellement par croissance interne, ce qui contribue à son autonomie et à sa cohérence.

 II - Comment les dirigeants endossent la culture Il arrive qu’un nouveau manager

II - Comment les dirigeants endossent la culture Il arrive qu’un nouveau manager prenne les rênes d’une entreprise, autour d’un dirigeant lui-même nouveau. Il est probable que dans la prise en mains de l’entreprise, et du fait de la nécessité de construire un bon relais avec les managers, qui encadrent le fonctionnement, ils seront amenés à intégrer euxmêmes une partie au moins de la culture. Si le manager ne reste pas déconnecté du corps social, enfermé dans sa sphère privée, il sera sensible au modèle hérité du fondateur et de l’historique de l’entreprise. La culture est « dans les murs » , elle est très contagieuse, et se capte aisément. Mais le nouvel arrivant peut profiter de son recul et de son extériorité initiale pour repérer les curiosités de la culture locale, et les traits qu’il faudrait modifier – avec la patience nécessaire. Si le nouveau dirigeant ne se place pas en prise avec le corps social, il n’aura pas un bon accord avec l’entreprise et sa culture, et ses décisions auront du mal à s’inscrire dans les faits, en raison soit de l’inadaptation de la culture aux nouveaux axes stratégiques, soit de la résistance qu’elle opposera aux évolutions nécessaires. La compréhension et la reconnaissance mutuelles ne s’établiront pas, ni la confiance et le leadership. Et avec le risque supplémentaire que la nouvelle équipe n’inhibe les qualités présentes dans la culture existante et les empêche de produire leurs fruits.

 III - Le refondateur et sa nouvelle stratégie Le nouveau dirigeant peut se

III - Le refondateur et sa nouvelle stratégie Le nouveau dirigeant peut se révéler un refondateur, c’est-à-dire quelqu’un capable de reprendre une partie de l’héritage, ou mieux d’en restaurer certaines parties, ce qui lui permettra de sceller une alliance profonde avec le corps social. Quelqu’un qui sait convaincre d’un « je vous ai compris » , avant d’engager l’entreprise dans un changement, au nom même de son identité et des impératifs de sa survie. Il s’agit de créer une connivence, qui touche en fait à des ressorts profonds, et va bien au-delà de ce qui pourra en être explicité dans les discours officiels et les messages de la communication interne. C’est à partir d’un tel lien, qui se noue très spécifiquement autour de la culture, que le leader refondateur pourra donner avec force une impulsion et un cap nouveaux, et convaincre l’entreprise que ce nouvel axe va lui permettre d’être encore plus elle-même et de retrouver le bon alignement, perdu temporairement, avec l’environnement qui change. Tel est le cas de S. Martin, placé à la tête d’un CCM Sulzer en perdition, et qui fait très publiquement allégeance à la culture de dévouement et de soumission de ce fabricant de moteurs de navires. Pour aussitôt renverser la relation sociale en mobilisant l’ensemble des salariés comme acteurs du redressement de l’entreprise.

C’est aussi l’un des ressorts les plus significatifs de la démarche de Carlos Ghosn,

C’est aussi l’un des ressorts les plus significatifs de la démarche de Carlos Ghosn, qui exalte le committment figurant au premier plan de la culture Nissan, en le réclamant de tous après l’avoir solennellement juré au nom de l’équipe de direction. Le cas de Steve Jobs revenant avec succès à la tête d’Apple est pour sa part un peu particulier – sans être unique – puisque le refondateur n’est autre que le fondateur initial !

 IV - La qualité des relais et des systèmes d’informations Qu’ils soient issus

IV - La qualité des relais et des systèmes d’informations Qu’ils soient issus du sérail ou non, les dirigeants ont besoin pour piloter l’entreprise d’une représentation pertinente mais simplifiée des réalités du terrain – ainsi que du fonctionnement des niveaux intermédiaires. La qualité des relais, mais aussi celle de la traduction des données d’un niveau à un autre sont essentielles. Si les faits et les logiques de fonctionnement ne sont pas correctement synthétisés et traduits dans un langage intelligible et maniable par les dirigeants, ceux-ci ne pourront pas les interpréter, et les intégrer dans leurs analyses et leurs décisions. Leurs tableaux de bord seront trop complexes ou incomplets, et peu exploitables. Il s’agit de dégager les bons indicateurs, les facteurs clés assurant une prise en compte pertinente des « réalités » du terrain par les niveaux décisionnels, pour faire pendant aux données dont seuls ces niveaux de direction disposent, ès qualités. Quand cela ne se fait pas, on voit fleurir les erreurs d’appréciation ou encore les fausses bonnes idées, séduisantes vues d’en haut, mais qui se révèlent si souvent contre-productives sur le terrain.

La culture d’entreprise joue ainsi un grand rôle dans la qualité et la fiabilité

La culture d’entreprise joue ainsi un grand rôle dans la qualité et la fiabilité des relais et des traductions. Elle détermine les pratiques réelles de communication tout au long de la chaîne, l’adhésion aux dispositifs de contrôle et aux indicateurs et le souci de leur fidélité, et la transmission des messages : ce qui se dit ou ne se dit pas, ce qui n’a pas droit de cité, ou n’est pas censé remonter à certains niveaux hiérarchiques.